Le Dr Jean-Claude Lapraz est un médecin généraliste convaincu de l´efficacité des plantes et de la nécéssité de soigner les patients dans leur globalité, pas seulement les symptômes. Il personnalise ses traitements en s´appuyant sur la notion deux fois millénaire de terrain qu´il a actualisée sur des bases scientifiques. La journaliste Marie-Laure de Clermont-Tonnerre a mené l’enquête jusque dans dans son cabinet médical. Un livre à deux voix chez Odile Jacob.
Le Dr Jean-Claude Lapraz et Marie-Laure de Clermont-Tonnerre La médecine personnalisée. Retouver et garder la santé. Odile Jacob, 2012, 341 p., 21,90 € |
Si les médecines alternatives sont souvent appelées parallèles, c’est qu’elles ne se croisent jamais avec la médecine enseignée dans les facultés. Le mérite du Dr Lapraz est d’avoir cherché à faire converger les parallèles ! Depuis ses débuts de médecin généraliste formé à l’hôpital, il n’a eu de cesse de réconcilier différentes approches, ne retenant que le meilleur de chacune d’elles. De la médecine hospitalière, il reconnait le succès dans les situations d’urgence. Mais il en a vite découvert les limites dans sa pratique de la « médecine à 10 minutes », une médecine des symptômes : échecs, récidives, effets secondaires des médicaments.
Rééquilibrer le terrain par les plantes
Si la notion de terrain est fondamentale dans l’endobiogénie, c’est paradoxalement par la phytothérapie que le Dr Lapraz a entamé son parcours novateur. Ce n’est que par la suite qu’il reconnaîtra l’importance de la notion de terrain et en renouvellera l’approche.
Sa rencontre avec le Dr Jean Valnet fut déterminante. Cet ancien chirurgien militaire avait constaté en Indochine que certains blessés ne présentaient aucune infection et que c’était ceux sur qui les paysans vietnamiens avaient appliqué des plantes médicinales. Il avait par la suite décidé de se consacrer à l’usage des plantes en médecine privée. Convaincu par Valnet de l’efficacité des plantes, Lapraz perçoit assez vite les limites et les faiblesses d’une phytothérapie trop « simpliste », basée elle aussi sur les symptômes. Il cherche alors avec le Dr Christian Duraffourd à intégrer l’usage des plantes « dans une approche globale et complète de l’homme et de sa physiologie » et crée avec lui le concept de phytothérapie clinique quand ils étaient tous deux assistants du Pr Reynier à l´hopital Boucicaut de Paris.
Cette approche globale de l’homme, Jean-Claude Lapraz la construira sur la notion de terrain. Mais il cherchera à dépasser l’approche traditionnelle en recherchant les causes profondes des différents terrains. C´est dans les déséquilibres du système hormonal qu´il trouvera une explication à des réactions différentes selon les individus face à la maladie. L’endobiogénie (endo pour endocrinien) « est fondée sur la reconnaissance du rôle primordial et incontournable du système hormonal à tous les niveaux du corps humain ». « Omniprésent et interdépendant, connecté à chacun de tous les autres systèmes, il est le seul qui soit capable, en l’état actuel des connaissances, d’assurer la régulation de la vie au niveau de chaque élément du corps humain, et dans le même temps de se gérer lui-même ».
Ecouter longuement, examiner attentivement
Comme le géologue avec son petit marteau, le médecin de terrain n’a pas besoin d’outils sophistiqués pour identifier celui de son patient : écoute attentive et examen clinique selon une méthodologie précise suffisent en général à révéler la réalité sous-jacente. Puis, tel un détective, le médecin va pouvoir faire confirmer ses indices par le labo. Mais là encore, point besoin d’analyses particulières. Bien souvent, les bilans sanguins classiques fournissent les données nécessaires au calcul d’index simples que le Dr Lapraz a codifiés avec le Dr Duraffourd sous le nom de « biologie des fonctions ». Ces indicateurs sont à même « de révéler une vérité bien plus fine et plus complexe que celle contenue dans les résultats de base », car ils reflètent le fonctionnement du système endocrinien. Ainsi le rapport globules rouges / globules blancs – l’index de rapport génital – reflète le rapport de force entre androgènes et oestrogènes (hormones de la masculinité et de la fémininité).
Quel avenir pour l’endobiogénie ?
Bien que basée sur une démarche scientifique, cette médecine qui se veut réellement intégrative n’est pas perçue en France comme une réponse aux dysfonctionnements du système de santé. Elle n’est pas enseignée dans les facultés. Outre le fait qu’elle heurte les intérêts des grands laboratoires pharmaceutiques, elle a du mal à se développer dans le système conventionnel de l’assurance maladie qui ne reconnait pas la valeur du temps. Passer de la médecine à 10 minutes à la médecine à une heure nécessite un changement de paradigme !
Toutefois, depuis 20 ans, de nombreux médecins français et étrangers ont été formés à l’endobiogénie qui a essaimé en Angleterre, aux Etats-Unis, en Tunisie et au Mexique. Dans ce pays, elle est encouragée par les autorités sanitaires qui souhaitent valoriser le capital que constitue l’herboristerie mexicaine. Ainsi le service de santé du district fédéral de Mexico a inauguré en 2011 le premier Centre spécialisé en médecine intégrative (CEMI).
Dans une interview à Automates Intelligents, le Dr Lapraz précise que son livre est destiné aux patients et aux médecins, mais qu’il souhaite aussi amener les pouvoirs publics à reconsidérer la façon dont la santé est abordée et traitée en France.
> Pour trouver un médecin pratiquant l’endobiogénie, on peut s’adresser à l’association Phyto 2000.