Impensable en France ! Dès le 1er août 2017, les dépenses en médecine anthroposophique, homéopathie classique, médecine traditionnelle chinoise et phytothérapie pourront être remboursées par le régime d’assurance maladie de base sans plus aucune limitation dans le temps. Et surtout, à cette date, ces disciplines auront, dans le système de santé suisse, exactement le même statut que celui de la médecine conventionnelle.
C’est ce que vient d’énoncer la nouvelle règlementation de « l’obligation de prise en charge des prestations de médecine complémentaire (MC) par l’assurance obligatoire des soins (AOS) ». Lors de sa séance du 16 juin 2017, en effet, le Conseil fédéral helvète a approuvé les nouvelles dispositions d’ordonnances mettant sur pied d’égalité les MC, administrées par des médecins, avec les disciplines conventionnelles.
Cette reconnaissance des quatre MC concerne uniquement les prestations fournies par les médecins ayant un titre de spécialiste et disposant d’une formation postgrade dans l’une de ces disciplines complémentaire.
Durant leur formation universitaire, les futurs médecins, pharmaciens, dentistes, vétérinaires et chiropraticiens doivent maintenant acquérir des « connaissances adéquates » sur les MC.
Évaluation
L’acupuncture, actuellement remboursée par l’AOS sans limite de durée, sera elle aussi mise au même niveau que les quatre nouvelles disciplines reconnues.
Le 17 mai 2009, le peuple et les cantons avaient largement (par 67% des voix) accepté un nouvel article constitutionnel (art. 118) sur la prise en compte, par le système de santé public, des médecines complémentaires. Cet article contraint la Confédération et les cantons à pourvoir à la prise en compte des MC. Il avait été proposé par le Parlement en contre-projet à l’initiative populaire « Oui aux médecines complémentaires » qui exigeait la prise en compte complète des MC dans le système de santé suisse et qui avait été retirée.
Depuis 2012, l’AOS remboursait les prestations de la médecine anthroposophique, de la médecine traditionnelle chinoise, de l’homéopathie et de la phytothérapie. Cette prise en charge était cependant limitée à fin 2017.
Pour mettre en œuvre le mandat populaire, le Département fédéral de l’intérieur (DFI) a suspendu, en 2013, l’évaluation, qui était en cours, de ces quatre disciplines. Il a ensuite demandé à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP, ministère suisse de la santé) d’élaborer, en collaboration avec les milieux concernés (administrations, médecins conventionnels et complémentaires, hôpitaux, assureurs, etc.), une solution alternative pour une prise en charge obligatoire des prestations de la médecine complémentaire en respectant les « principes d’efficacité, d’adéquation et d’économicité » (principes EAE).
Pour concrétiser ce processus, l’ordonnance sur l’assurance-maladie (OAMal) et celle sur les prestations de l’assurance des soins (OPAS) furent adaptées.
Principe de confiance
La procédure de consultation prit fin le 30 juin 2016. Après bien des débats, rendus particulièrement ardus par la difficulté d’évaluer globalement l’efficacité des MC en question, un consensus fut trouvé. Les quatre MC seront placées sur un pied d’égalité avec les disciplines médicales classiques.
À certaines conditions (tradition de recherche et d’application, preuve scientifique et expérience médicale, formation postgrade), les prestations de la médecine anthroposophique, de la médecine traditionnelle chinoise, de l’homéopathie et de la phytothérapie, administrées par des médecins, seront soumises au « principe de confiance » et prises en charge par l’AOS. Le principe de confiance suppose que « les médecins ne fournissent que des prestations qui remplissent les obligations d’efficacité, d’adéquation et d’économicité ».
Les autorités politiques et médicales ont donc choisi de faire confiance aux hommes de l’art ainsi qu’à leur système de formation pour mettre en œuvre les traitements en MC que les citoyens suisses ont réclamé à une forte majorité.
Une commission pour les prestations controversées
Seules « certaines prestations controversées » seront examinées, tout comme pour les autres disciplines médicales conventionnelles. En cas de problème, en effet, si par exemple une méthode est expressément critiquée par certains, un dispositif particulier est prévu. Les prestations controversées, tout comme les nouvelles d’ailleurs, sont évaluées sur demande par une Commission fédérale des prestations générales et des principes (CFPP).
En principe, toute personne ou organisation intéressée peut déposer une « demande de prise en charge des coûts d’une prestation nouvelle » ou « remettre en question le remboursement d’une prestation ».
La demande est déposée en règle générale par un professionnel (fabricant, hôpital ou groupe hospitalier, société médicale) ou, occasionnellement, par une organisation de patients, par un assureur ou par l’OFSP lui-même.
Et c’est le DFI qui tranche en définitive, décidant si la thérapie ou la prestation mérite ou non son remboursement par le régime général.
Pour que le principe de confiance puisse s’appliquer, les prestations doivent se fonder sur les éléments suivant :
200 techniques de médecine complémentaire
Par ailleurs, d’autres médecines douces (médecine ayurvédique…) peuvent faire l’objet de prestations fournies par des thérapeutes non médecins. Elles ne relèvent pas de l’AOS et sont couvertes par des assurances complémentaires privées. Celles-ci ont établi des listes de disciplines qu’elles acceptent de couvrir.
A noter que dans ce domaine, le secrétariat d’Etat à la formation, à la recherche et à l’innovation (Sefri) avait validé très officiellement le 28 mai 2015, le diplôme de « naturopathe ». Une première en Europe ! Un examen similaire pour les thérapeutes complémentaires est en cours d’évaluation. A l’avenir, ces diplômes fédéraux seront une condition d’obtention des autorisations cantonales d’exercer.
Aujourd’hui en Suisse, quelque 3000 médecins et 20 000 thérapeutes non médecins utilisent près de 200 techniques de médecines complémentaires (source : OFSP).
Ainsi, grâce à un système politique ouvert à l’initiative populaire et à leur art du compromis, les Suisses sont parvenus à intégrer cinq médecines complémentaires dans leur système de santé, médecines douces qui sont désormais considérées, du point de vue professionnel, politique et social, au même titre que les disciplines classiques.
bonjour,
il y a longtemps que la Suisse offre à ses citoyen-ne-s qui sont attentif-ve-s à la qualité de leur alimentaion (bio, pas d’alcool, de tabac, …) une subvention annuelle pour les encourager !
Il vaut mieux utiliser le terme de médecines non conventionnelles en tous cas dans la CEE ; raison : le terme ‘conventionnel’ renvoie généralement au fait de l’existence de conventions qui régissent les relations entre les membres du corps médical et les organismes de sécurité sociale. Les critères précédents peuvent apparaître toutefois contestables par rapport à ce qui fonde un tel distinguo, comme on le verra plus bas (référence à la “Science”).
Il est donc préférable d’utiliser le terme « médecines non conventionnelles » plutôt que de reprendre les vocables flous comme, par exemple, les approches ‘officielles’ et les approches ‘non officielles’, appelées aussi ‘parallèles’, ‘complémentaires’ ou ‘alternatives’…
Le terme de médecine non conventionnelle est en effet celui qui a été retenu par la Commission européenne pour qualifier les médecines dites alternatives (Voir la Résolution sur le statut des médecines non conventionnelles, qui a été votée le 29 mai 1997 (Cf. http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+REPORT+A4-1997-0075+0+DOC+XML+V0//FR).
C’est en plus ce qui se révèle être bien en phase avec l’analyse suivante réalisée par un Ordre des médecins. (http://www.retrouversonnord.be/Epistemologie_des_sciences.htm#ordre) qui s’adresse aux médecins et leur dit : « évitons le terme de médecine alternative. Cette épithète suggère une exclusivité tout à fait contraire à l’éthique comme au bon sens. La tolérance de l’autre a l’avantage de l’envisager sous l’angle d’une complémentarité qui, loin de consacrer une rupture entre praticiens, loin d’imposer au malade une dissimulation de ses démarches alternes, permet de préserver un contact utile et profitable à tous. Le débat, pour ne pas être passionnel, se doit d’être raisonné et centré sur l’intérêt du malade. Son adhésion à une démarche thérapeutique, quelle qu’elle soit, ne doit pas le disqualifier ».
En l’occurrence, le terme officiel suisse est “médecine complémentaire”. Et cette médecine est désormais également conventionnée, comme la médecine classique.
Même si la Suisse est allée très loin dans la reconnaissance de médecines complémentaires, il ne faut pas oublier qu’il y a depuis longtemps en France de nombreux médecins homéopathes ou acupuncteurs conventionnés dont les consultations sont remboursées par la Sécu au même taux que leurs confrères (70% du tarif conventionné). Ils sont répertoriés dans l’annuaire ameli : http://annuairesante.ameli.fr/. Par ailleurs, les médicaments homéopathiques sont remboursés (à 80% en Alsace-Moselle et à 30% ailleurs).
Tableau récapitulatif des taux de remboursement : https://www.ameli.fr/assure/remboursements/rembourse/tableau-recapitulatif-taux-remboursement/tableau-recapitulatif-taux-remboursement
En France, les médicaments en homéopathie sont effectivement remboursés mais, globalement, à seulement 30 % pour l’homéopathie, mais ni en phytothérapie, ni en médecine traditionnelle chinoise ni, encore moins, en médecine anthroposophique. Et, pour ces 3 médecines complémentaires, même les consultations ne sont pas remboursées.
Mais surtout, TOUTES les médecines complémentaires (y compris l’homéopathie et l’acupuncture), qui sont désormais reconnues à égalité avec la médecine académique en Suisse, sont en France susceptibles, selon le cas, d’être considérées comme charlatanisme ou dérive sectaire. Nombre de médecins sanctionnés pour ces raisons peuvent en témoigner.
Une différence énorme de paradigme entre les deux pays !