Les quelques 200 participants de la journée “Smart médias et renaissance du journalisme”, organisé par Aqui.fr à Cenon (Bordeaux), ont affiné ensemble le tableau de la transition périlleuse que vit la presse à l’heure du numérique. Un avant-goût de la journée du syndicat de la presse indépendante d’information en ligne, le 19 octobre 2012 prochain.
Ensemble, parce que pendant toute la journée, intervenants et public étaient interconnectés via twitter sous le hashtag “rdv_aqui”, faisant progresser le débat en temps réel sur grand écran, un “live tweet” au top des trending topics sur twitter en ce 21 septembre 2012. Au terme de débats foisonnants, tenus dans une ambiance quasi familiale, on retiendra surtout l’image d’un virage à haut risque pour la presse. Une transition vertigineuse.
“On sent bien que la presse régionale est dans un entonnoir”
Douloureuse mutation que vit Sud Ouest actuellement. Le discours de présentation de Laurent Cramaregeas, au sujet de la réorganisation du travail et des tâches au sein du journal, n’a pas pu occulter la difficulté d’une telle mutation dans des structures lourdes (négociations salariales, freins générationnels, coût financier, habitudes historiques). Surtout comparé à l’extraordinaire mobilité technique du numérique et à la souplesse des nouveaux concurrents, les sites d’infos locales (comme Dijonscope, Carré d’info à Toulouse, Rue89 Strasbourg, etc), véritables aiguillons, pas toujours bien vus du monde papier.
“On sent bien que la presse locale est dans un entonnoir”, témoigne Joël Aubert, ancien directeur de la publication de Sud Ouest, qui a passé 32 ans dans cette grande “maison”. A 68 ans, le fondateur d’Aqui.fr s’est entouré de jeunes journalistes ayant “le feu sacré” malgré la sinistrose qui affecte même les nouveaux venus. “La presse en ligne n’est pas un secteur facile du tout. Nous sommes financièrement tous sur le fil. Mais nous avons au moins la liberté de faire preuve de créativité”.
Avec 300 000 visites quotidiennes sur le site SudOuest.fr, la presse locale historique a encore néanmoins sa carte à jouer, grâce à ses moyens humains. Mais les choix stratégiques seront-ils les bons? Ne faudrait-il pas mieux créer un pure player local plutôt que mettre en chantier tout un journal? Certains participants ont évoqué cette question.
Au final, l’avenir de Sud Ouest est apparu bien incertain. Comme en témoignent certains tweets parfois un peu durs : “Et pendant ce temps, plan social discuté par son conseil de surveillance” (Suzanne Galy). “Pas de “recrutement” de nouveaux correspondants à Sud Ouest… les “anciens” du papier seront réorientés sur le web” (Suzanne Galy). “Ça n’a pas l’air d’être la grosse poilade @sud-ouest…” (Hugues de Domingo).
L’épreuve du feu aussi pour les pure players
Le jeune secteur de la presse en ligne n’a toujours pas trouvé le modèle économique idéal. Pas sûr d’ailleurs qu’il en existe. La voie serait plutôt celle de solutions originales et variées. Ouvertures.net a présenté la sienne devant un public averti, à la fois ouvert à toute initiative nouvelle, mais demandant cependant à voir. Le secteur est en effet conscient des difficultés financières actuelles. A l’occasion de cette problématique, Rue89 s’est expliqué sur le rachat par le Nouvel observateur, “structure familiale” qui leur a permis mutuellement d’atteindre la masse critique.
Des pistes ont néanmoins pu émerger
> Développer davantage le concept marketing. Les journalistes doivent apprendre à vendre leur “marque” désormais.
> Se pencher sur la notion nouvelle de transmédia, présenté par Antoine Chotard, spécialiste de l’évolution numérique, dont les propos avant-gardistes ont atteint les limites de l’auditoire. “C’est un peu le George Clooney du #rdv_aqui. On comprend rien à ce qu’il dit mais comme il a l’air calé, on acquiesce”, dixit le trublion du live tweet, Mr Shuffle.
> Faire un travail de pédagogie auprès des annonceurs. “Leur faire comprendre l’intérêt de la publicité numérique, c’est ce que nous faisons depuis un an. Et ça commence à prendre”, explique à Ouvertures Xavier Lalu, co-fondateur de Carré d’Info sur Toulouse. Effectivement, les avantages, pas toujours perçus par le monde publicitaire, sont nombreux : faible coût, possibilité de trouver un public ciblé (local ou de telle sensibilité), fort taux de visibilité (une page vue est vue! Alors que dans un journal, il est difficile de dire si le lecteur a posé son regard sur la bonne page), accès immédiat au produit en un clic.
“Une chose est sûre, l’heure n’est plus à la concurrence mais à la coopération. Nous avons tous une spécificité. C’est ensemble qu’il faut réfléchir à notre avenir. Je souhaite que l’on se mette autour de la table et qu’on partage notre ressenti”, propose Joël Aubert, qui compte fédérer des personnes ressource pour faire émerger des solutions.
A noter. La recherche d’un éco-système de la presse en ligne sera au centre des débats du 3e rendez-vous du Spiil (syndicat de la presse indépendante d’information en ligne), le 19 octobre prochain.
bonjour,
j’ai coorganisé le colloque avec joel aubert et réalisé un photo reportage sur la journée … ou j’ai mis à la fin un lien vers l’article de votre site. peut être vous avez envie de relayer ma page aussi !
bien cordialement,
andrea schmitz
Ping : Journalisme : Muter, monétiser, durer, l'équation à résoudre d'un monde dans le coma mais pas encore mort | My global Bordeaux
Ping : Blog photos d'Andrea Schmitz » Smart Aqui.fr … let’s tweet again !
Bonjour Pryska!
Juste une petite coquille à signaler : les 300 000 visites du site Sudouest.fr ne sont pas mensuelles mais… quotidiennes. 31 fois plus 🙂
Merci pour cette précision de taille. J’avais effectivement vérifié mais oublié de rectifier.