Qui ? Pierre-Emmanuel Neurohr (46 ans).
Où ? Aéroport de Roissy Charles de Gaulle.
Quoi ? Il veut que tout le monde comprenne que prendre l’avion, c’est détruire le climat. Et pour se faire entendre, il s’est à cinq reprises mis en travers des taxiways du plus grand aéroport français. Déjà condamné plusieurs fois, il comparaissait à nouveau ce vendredi 5 septembre 2014 devant la 14e chambre correctionnelle du tribunal de Bobigny (93) pour des faits remontant au 5 septembre 2012. C’est pour encore une fois alerter l’opinion qu’il a retardé un vol Air France à destination de Marseille, après avoir cisaillé le grillage de la « zone réservée ».
Un lanceur d’alerte
« L’ensemble des études scientifiques prouvent que d’ici 2030, dans à peine 15 ans, des parties entières de la planète seront en situation de sécheresse quasi-permanente. L’agriculture des pays des régions tropicales et subtropicales, entre autres, va être anéantie, et des dizaines de millions d’êtres humains vont être assassinés. Etant donné qu’il ne s’agira pas de fluctuations naturelles, mais de la conséquence prévisible, planifiée, de la pollution générée par des pays comme la France, ces millions de morts seront les victimes d’un génocide. Toutes les arguties juridiques et sémantiques jamais inventées n’y changeront rien. » (son plaidoyer complet, son site)
Il était poursuivi pour entrave à la circulation d’aéronef, pénétration dans la « zone réservée » et dégradation de biens (le grillage). Il s’est défendu seul, sans avocat, invoquant la nécessité impérieuse d’agir maintenant pour défendre le bien commun et éviter le génocide dont l’évidence augmente de jour en jour. Il a justifié son refus de se soumettre à une expertise psychiatrique en soulignant que son engagement non-violent était un signe de santé mentale et morale.
Un procès politique selon l’accusé
L’aéroport de Roissy et la compagnie Air France s’étaient portés partie civile, mais seule cette dernière était représentée à l’audience. Son avocat a réclamé 8000 € de dommages et intérêts pour l’atteinte portée à l’image de l’entreprise, qui fait des efforts en matière de lutte contre le réchauffement et pour le préjudice lié au retard de l’avion. Il a souligné que le transport aérien n’était pas le principal contributeur à l’effet de serre et qu’il faudrait plutôt arrêter les camions sur l’autoroute.
La part des avions
« Depuis 1990, les émissions de CO2 liées à l’aviation ont augmenté de 65%, alors qu’au niveau national, tous secteurs d’activité confondus, elles ont baissé de 10% entre 1990 et 2010. Autrement dit, elles pèsent de plus en plus lourd dans notre bilan carbone. Au total, en 2011, elles représentaient 6% des rejets de gaz carbonique de tout le pays, avec environ 22 millions de tonnes. (…) Environ 3 % des émissions mondiales de CO2 proviennent du trafic aérien. C’est peu. Mais elles progressent à une vitesse vertigineuse. Et en prenant en compte les autres gaz à effet de serre qu’il dégage (méthane, ozone) et la création de traînées de condensation, sa contribution réelle au dérèglement climatique pourrait atteindre autour de 5%. »
Une question de regard
« Nous sommes au milieu des années 2000. Je me promène dans les couloirs de la Tate Modern, le célèbre musée d’art contemporain de Londres. Au mur, de grandes photos d’avions posées sur des pistes d’aéroport. Elles ont été prises par Peter Fischli et David Weiss, deux artistes suisses. Cette série me plait particulièrement. Elle m’évoque le sentiment cotonneux du jetlag et l’excitation des départs. Mon ami John me regarde, consterné : « Un jour, on verra peut-être ces images comme on regarde aujourd’hui les photos des camps de concentration. Elles seront scandaleuses. »
Extraits de Je crise climatique. La planète, ma chaudière et moi. Jade Lindgaard, La Découverte, août 2014, 221 pages, 18 €
La procureure, jugeant qu’il n’y avait pas de danger imminent et que « le militantisme a des limites », que d’autre part l’accusé était persistant dans l’action et n’avait pas respecté le contrôle judiciaire qui lui interdisait de se rendre à Roissy, a requis une peine de prison de quatre mois dont deux avec sursis et une amende de 500 € pour chacune des infractions.
Après délibéré, Pierre-Emmanuel Neurohr a été jugé coupable des trois chefs d’accusation et condamné à une peine de 2 mois ferme pour entrave à la circulation et à une amende de 600 € pour chacun des deux autres. Il est par ailleurs condamné à verser 1500 € de dommages et intérêts et 500 € de frais de procédure à Air France.
Ping : L’écologiste P.-E. Neurohr à nouveau condamné pour avoir tenté d’empêcher un avion de décoller | La Méduse
Impresionnante video, 3’14” qui nous paraissent interminables, seul face à cet énorme avion.
Quel courage!
Ce type n’est qu’un abruti technophobe qui ne fait rien avancer aux problèmes.