Le nettoyage à sec est dans le collimateur des associations environnementales qui demandent l´interdiction de l´usage du perchloréthylène, agent nettoyant hautement polluant. Parallèlement, le marché du pressing écolo connaît un récent essor.
Les pressings nouvelle génération de l´enseigne Sequoia, comme ici à Vannes, misent sur la démarche environnementale et l´éco-design pour séduire leurs clients. Photo Séquoia. |
C´est un nouveau coup de poing sur la table. Le Réseau environnement santé (RES) et Générations futures rappellent à l´ordre les pouvoirs publics sur la question du perchloréthylène, un produit largement utilisé dans les pressings pour le nettoyage à sec. Ce secteur représente environ 4 500 entreprises pour 10 000 salariés. L´immense majorité des enseignes utilise toujours cet agent nettoyant.
Pollution de l´air ambiant, pollution des nappes phréatiques… « le perchloroéthylène est toxique pour les travailleurs, pour les riverains et pour la population en général. Des centaines d’études scientifiques accumulées depuis des décennies le disent ; c’est aussi ce qu’apportent les témoignages des victimes des émanations des pressings », rappellent les associations de défense de l´environnement et de la santé dans un dossier de presse communiqué jeudi 16 février dernier.
« Dix études de cancérogénicité ont été menées chez le rongeur et ces dix études concluent à un effet cancérogène. Les études sont encore plus nombreuses, et tout aussi convergentes, pour les autres effets toxiques : sur le système nerveux, sur les reins et sur le foie. Les études épidémiologiques en milieu de travail retrouvent tous ces effets et même chez les riverains, pour lesquels il est difficile par principe de mener des études de ce type, des effets neurologiques ont été mis en évidence ».
Une substance dangereuse classée prioritaire
La réglementation européenne s´est déjà saisie du problème. Elle a durci sa réglementation sur cette substance classée dangereuse pour les milieux aquatiques, entraînant une réduction de la consommation de perchloréthylène, notamment dans les pressings : 26 000 tonnes par an dans l’Union européenne en 2004 contre 62 400 tonnes en 1994 (Ineris, 2007. Données technico-économiques sur les substances chimiques en France : Tétrachloroéthylène[1]).
Ce produit fait partie des huit substances de la liste n° 1 de la directive substances dangereuses (76/464/CE), reprise dans la « directive cadre eau » (DCE). L´objectif pour ces substances est la suppression totale des rejets d´ici 2021, avec une échéance intermédiaire de réduction de 50 % au niveau national d’ici 2015 pour le perchoréthylène. En théorie, aucun rejet de solvant ne doit avoir lieu, ni dans le réseau, ni dans le milieu naturel. Or, la pollution au perchloréthylène est toujours décelée en Ile-de-France aussi bien dans le réseau d´assainissement que dans le milieu naturel.
L´agence de l´eau soutient les pratiques alternatives L´agence de l´eau du bassin Seine-Normandie est particulièrement concernée par le problème de la pollution au perchloréthylène : avec 1750 pressings sur son territoire (dont 700 à Paris et 461 dans les 7 autres départements franciliens en 2010), 1950 machines, 1 000 tonnes de perchloréthylène consommées et 600 tonnes de boues contenant 50% de perchloréthylène. Elle accompagne désormais uniquement les projets qui n´utilisent plus ce produit en tant qu´agent nettoyant. En 2011, l´agence a participé à l´achat de 27 machines de nettoyage à l´eau et 35 machines utilisant les hydrocarbures. Entre 2004 et 2009, l´agence de l´eau aidait encore les pressings à renouveler leur parc avec des machines fonctionnant au perchloréthylène mais de dernière génération, permettant une séparation des rejets et un retraitement séparé de ces déchets sous forme de boues concentrées. Pour la période 2007/2009, elle a ainsi subventionné 182 nouvelles machines pour un montant de 1,3 millions d´euros. « En 2009/2010, seul 1 % du parc situé dans le bassin Seine Normandie utilisait des machines sans perchloréthylène. La situation est en train d´évoluer vue la nature des dossiers qui nous parviennent désormais », explique pour l´agence Philippe Lucas, de la direction des collectivités et de l´industrie. |
Cet encadrement est donc jugé insuffisant par les associations, qui dénoncent le maintien de l´autorisation de ce produit : « Les procédés de remplacement existent. L’interdiction du perchloroéthylène dans les pressings doit être décidée. C’est pour cela que le Réseau Environnement Santé soutient l’action de l’association de défense des victimes d’émanations de perchloroéthylène des pressings et que Générations Futures a décidé de se constituer partie civile dans ce procès et de déposer plainte pour carence fautive de l’Etat ».
Trois technologies alternatives principales
Du côté des professionnels, les pratiques sont cependant en train d´évoluer, quoique lentement du fait du coût d´une machine de nettoyage à sec (environ 30 000 euros). De plus en plus de pressings utilisent des procédés non polluants. Investi sur ce dossier, l’Ineris (Institut national de l’environnement industriel et des risques) identifie trois technologies alternatives principales : le nettoyage au mouillé, les hydrocarbures (incluant les composés siliconés comme le D5) et le CO2. « Ces technologies étaient présentes dans les autres pays (Europe et monde) mais n’avaient pénétré le marché français que de façon anecdotique ». Désormais, le secteur du pressing écologique est en pleine expansion, comme le montre l´exemple de la franchise Séquoia.
Avec 26 magasins en France, Sequoia est encore un petit Poucet dans l´univers du pressing, mais son concept éco-responsable séduit de nouveaux adhérents. Vingt nouvelles enseignes devraient voir le jour en 2012. « Notre procédé vient des Etats-Unis. La technologie GreenEarth utilise le siloxane, un dérivé de la silice, le principal constituant du sable. C’est un liquide incolore, inodore, doux et fluide. Le siloxane a passé avec succès les tests d´innocuité imposés par la directive européenne Reach (la nouvelle réglementation sur les substances chimiques). C´est un produit non volatil, non cancérogène, non polluant. L´Agence de l´eau Seine Normandie subventionne donc nos machines via le programme de substitution du perchloroéthylène dans les pressings », explique Brigitte Olive, directrice du développement de la franchise de pressings Sequoia.
« La législation se renforce autour du perchloroéthylène, commente l´Ineris dans son dernier rapport consacré au sujet (État des lieux des technologies alternatives au nettoyage à sec au perchloroéthylène, Rapport d´études, mai 2011). Les exploitants reprenant un pressing préfèrent investir directement dans une technologie avec une meilleure image, pour des questions environnementales et de marketing… ».
[1] Le tétrachloroéthylène est une autre dénomination du percloroéthylène ou perchloréthylène.
Pressings : l’interdiction du perchlo annoncée par le Ministère de la Santé
Communiqué de presse du Réseau Environnement Santé
Paris, le 19 avril 2012,
Une délégation du Réseau Environnement Santé (RES) et de l’Association des Victimes des Émanations de Perchloroéthylène des Pressings (ADVEPP) a été reçue à sa demande aujourd’hui par le Directeur Général de la Santé.
Celui-ci a annoncé le principe de l’interdiction du perchlo dans les pressings selon les modalités suivantes :
– Interdiction immédiate dans les installations nouvelles
– Fermeture immédiate des installations induisant une contamination des riverains supérieure à 1250 microgrammes par mètre cube (1250 µg/m3)
– Arrêt au 1er janvier 2014 des installations de plus de 15 ans
– Arrêt des installations existantes dites non NF au 1er janvier 2018
– Arrêt des installations NF au 1er janvier 2022
Le principe d’un suivi de ces mesures avec nos 3 associations a été acté. La prochaine réunion est prévue fin juin.
Le RES, l’ADVEPP et Générations Futures demandaient que la norme définie par l’Agence de Protection de l’Environnement des États-Unis à 40 µg/m3 soit prise en compte en France. Elles se félicitent néanmoins du changement radical de la politique du Ministère de la Santé qui ne défend plus l’usage contrôlé du perchlo mais accepte le principe de son remplacement.
Le RES, l’ADVEPP et Générations Futures vont continuer à agir pour préserver la santé des riverains et des travailleurs des pressings. Elles les appellent à se manifester auprès des Agences Régionales de Santé et des Préfectures pour obtenir un contrôle de leur contamination.
http://pressingetvoisins.wordpress.com/
Chez les professionnels il est dit qu’un syndicat a déposé un recours contre le ministère?
Un courrier circule de la Fédération Nationale de l’Entretien des Textiles et sur le site:http://fnetweb.fr/