Les sénateurs ont voté une proposition de loi suspendant les conditionnements alimentaires à base de bisphénol A (BPA), un perturbateur endocrinien très répandu dans notre environnement quotidien. Après l’interdiction des biberons en BPA en 2010, les sénateurs confirment donc le texte voté par les députés en octobre 2011. Si le texte est définitivement adopté par l’Assemblée nationale, la suspension interviendra le 1er janvier 2013 pour les conditionnements destinés aux 0-3 ans, le 1er janvier 2015 pour les autres.
Le Réseau environnement santé, qui « salue » cette décision, « invite le gouvernement à accélérer la navette parlementaire avec l’Assemblée nationale et à préparer sans tarder les projets de décrets d’application pour que la loi puisse entrer en vigueur dans les meilleurs délais, en particulier vis-à-vis de l’échéance du 1er janvier 2013 pour les produits destinés aux 0-3 ans ».
Pour l’association, le cas du bisphénol A est « exemplaire d’un problème sanitaire plus large : les perturbateurs endocriniens imposent un nouveau paradigme toxicologique où ce n’est plus la dose qui fait le poison mais la période critique d’exposition. Les caractéristiques de la perturbation endocrinienne sont à mettre en regard de l’échec des politiques classiques de santé publique à endiguer l’épidémie de maladies chroniques ».
RES regrette cependant « les délais injustifiables [1er juillet 2015] accordés aux industriels aux dépens de la santé publique. Le recul de l’échéance d’interdiction du BPA est néanmoins compensé par l’élargissement inattendu de la loi à l’interdiction de tous les CMR [cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques] de catégorie 2, dont trois phtalates (DEHP, DBP, BBP), et de tout perturbateur endocrinien dans les dispositifs médicaux ».
La filière plastique déplore “une volonté d’affichage politique”
Le texte de loi est critiqué par les industriels de la chimie et du plastique qui, dans un communiqué daté du 9 octobre 2012, regrettent « que la volonté d’affichage politique ait primé sur la méthode ». Ils rappellent que l’Académie nationale de médecine avait jugé en 2011 cette décision « irréaliste en l’absence de produits de remplacement ayant fait la preuve de leur efficacité et de leur innocuité. Or, la nouvelle version de la proposition de loi ne conditionne pas l’interdiction à la validation de l’innocuité des substituts ».
Ce vote, précipité selon eux, « n’attend pas les conclusions ni de l’Agence européenne de sécurité des aliments (AESA) qui seront publiées au printemps 2013 ni des autres agences internationales qui doivent publier leurs travaux sur le sujet dans les mêmes délais ».
La filière des plastiques s’inquiète d’une « dérive de la gouvernance qui consiste à sur-réagir, sous la pression, à des “alertes” qui n’ont pas encore donné lieu à une convergence des principales autorités ou agences sanitaires dans le monde ».