La presse classique challengée par le journalisme citoyen

Les citoyens congédient le pouvoir et font eux-mêmes l’information. Belle leçon pour la presse classique locale. France 24 a su intelligemment utiliser cette nouvelle donne.


Photo : Houda Trabelsi pour Magharebia.

« Le journalisme citoyen a constitué le principal fer de lance de la révolution tunisienne, depuis l’immolation par le feu de Mohamed Bouazizi. Un mois après, alors que les médias officiels restaient dans leur mutisme, cet événement fut relayé par les réseaux sociaux, essentiellement, poussant Ben Ali à fuir le pays. Leurs réactions, d’ailleurs, n’ont fait qu’alimenter le feu de la révolte populaire en Tunisie. Alors que les réseaux sociaux, en l’occurrence facebook et twitter, inondaient de vidéos et de photos montrant l’ampleur des manifestations et des confrontations à Sidi Bouzid et Kasserine, nos médias se limitaient à dire que ces événements sont des actes isolés et qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter. »

Ce constat est formulé par webmanagercenter, un site tunisien investi dans le développement d’une information économique et financière « fiable, utile et de qualité ». Il montre la fracture existant entre le système médiatique classique et celui constitué désormais un peu partout dans le monde par le filet des réseaux sociaux. Il montre qu’il faut compter, désormais et définitivement, avec le citoyen.

Les politiques ne peuvent plus décider seuls ; les médias ne peuvent plus informer seuls. Et si ni les uns ni les autres ne s’ouvrent à ces nouveaux interlocuteurs, ils seront proprement balayés…

Vers la création d’un Conseil de presse

Le conseil des ministres a décidé, le 10 février 2011, sous la présidence de M. Foued Mebazaa, président de la République par intérim, de créer une commission chargée de veiller au respect de la déontologie journalistique.

Selon Taïeb Baccouche, porte-parole du gouvernement provisoire, cette commission comprendra des compétences nationales et des représentants des différentes composantes de la société civile.

> Voir également : A quoi ressemblera la nouvelle « instance de l’information » ?

France 24 l’a compris. Suivant au jour le jour la révolution tunisienne, elle « a recouru à une panoplie d’observateurs qui constituait sa principale source d’information, essentiellement avant le 14 janvier 2011 [date de départ du président Ben Ali]. Elle a organisé, le 17 février 2011, une rencontre avec ces observateurs pour qu´ils puissent apporter leurs témoignages sur leur vécu ».

Parmi eux, la blogueuse Lina Ben Mhenni est intervenue à plusieurs reprises sur France 24, à visage découvert : « Je ne cherchais pas à me protéger. J’étais déjà très suivie, donc il ne servirait à rien de me cacher», explique-t-elle. Le lycéen Rami Zaatour, originaire de Gabès, rapportait ce qui se passait dans son lycée. Sahbi Khalfaoui, un militant d’opposition, qui a témoigné sur la chaîne, a été incarcéré trois jours avant le 14 janvier 2011.

« Une chose est sûre, conclut webmanagercenter, ce sont les réseaux sociaux qui ont façonné la révolte populaire en Tunisie. Ces médias alternatifs étaient le seul recours en absence de médias officiels crédibles. (…) Le journalisme citoyen a eu le mérite d’ouvrir la voie au journalisme classique, lui permettant de tirer les leçons des fautes du passé. »

Si on ne peut pas véritablement parler encore d’une « nouvelle presse », le journalisme citoyen « aura certainement toujours sa place comme partenaire de cette évolution vers un avenir meilleur de la presse tunisienne ».

Création du “Fonds Citoyen 111”

La Banque Centrale de Tunisie (BCT) a décidé la création d’un “Fonds citoyen 111”, un fonds indépendant de collecte de dons provenant de parties tunisiennes et étrangères ayant exprimé leur souhait d´accorder un soutien financier à la Tunisie post-révolution.

Selon le communiqué de la BCT, cette création a pour but de collecter les ressources pour financer des « projets de développement dans les régions ainsi que sous forme d’assistance sociale, directement ou par le biais des associations habilitées à cet effet ».

Le gouverneur de la BCT a mis l´accent sur l´indépendance juridique du fonds, indiquant que celui-ci ne relève d´aucune partie administrative ou catégorie d´entreprises et fonds connus en Tunisie. Une commission de gestion, regroupant notamment des membres des composantes de la société civile, qui ne percevront pas de contrepartie financière, sera chargée de la gestion des ressources du fonds.

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