La médecine traditionnelle s’organise

En Afrique, l’institutionnalisation de la médecine traditionnelle progresse à petits pas. Le 31 août dernier, la Journée africaine sur ce thème a réuni experts et autorités pour trouver les voies d’une meilleure intégration des leaders communautaires, guérisseurs et psychiatres traditionnels dans le système conventionnel.

 

Les ministres de la santé de 47 États africains et les experts ont réfléchi sur les façons d´intégrer des tradipraticiens dans le système sanitaire des États membres de l´Union africaine. Réunis le 31 août dernier à Yaoundé (Cameroun) dans le cadre de la 6e Journée africaine de la médecine traditionnelle, ils ont évalué le degré d´avancement de la décennie africaine de la médecine traditionnelle 2001-2011, adoptée en 2001 à Tripoli, en Libye.

L´Afrique, notamment, veut se doter d´un répertoire de la médecine traditionnelle pour sauvegarder et valoriser les connaissances dans ce domaine. Les experts de la santé ont appelé à la collecte systématique et au traitement rigoureux de ces savoirs informels du patrimoine africain.

Selon le directeur régional de l´OMS pour l´Afrique, le docteur Luis Sambo, l´Afrique ne pourra réussir à améliorer la santé de ses populations si la médecine traditionnelle n´est pas prise en compte dans les soins de santé primaires. Il a invité les pays africains à poursuivre le programme d´institutionnalisation de la médecine traditionnelle avec l´aide de l´OMS.

Si 75% des pays de la région africaine ont élaboré et mis en œuvre une politique nationale de médecine traditionnelle, beaucoup reste encore à faire pour une reconnaissance de ces pratiques.

Les tradipraticiens gabonais, par exemple, demandent la mise en place d’un conseil national de l’ordre des médecins traditionnels, l’introduction de l’enseignement de la médecine traditionnelle dans les programmes pédagogiques et l’appui logistique aux États pour l’intégration de la médecine traditionnelle. Une commission de rédaction des textes organiques pour la régularisation de l’exercice de la médecine traditionnelle en République gabonaise a d’ailleurs été mise en place en 2006 par le gouvernement.

Au Sénégal, un projet de loi portant réglementation de la médecine traditionnelle se trouve actuellement sur la table du Conseil d’État. Le ministère de la santé a annoncé la tenue d’un conseil interministériel pour l’adoption d’une véritable politique liée à cette pratique, la création d’un bureau au ministère de la santé et de la prévention.

Dans ce pays, l’ONG Enda Santé plantes médicinales compte intégrer les tradithérapeutes et les agents de santé communautaires de la zone dans les centres de soins de santé primaires « pour une meilleure efficacité dans leurs interventions ». Une expérimentation est en cours dans le cadre d´un projet (projet Fontilles) destiné aux tradithérapeutes et agents de santé communautaires de Richard-Toll et Podor.

Il faut des protocoles d’essai adaptés

Pour Manto Tshabalala-Msimang, ministre sud-africaine de la santé et présidente de la Conférence africaine des ministres de la santé, la pharmacopée traditionnelle employée par les guérisseurs africains ne doit pas être soumise aux essais cliniques à l’occidentale, qui ne feraient qu’« embourber » son développement. Elle n’est pas opposée par principe aux essais cliniques mais souhaite des « protocoles adaptés » à une pharmacopée « utilisée par les guérisseurs traditionnels parfois depuis des milliers d’années ». Elle met également en garde contre « les charlatans qui nuisent à l’image » de la médecine traditionnelle, « qui font toutes sortes de promesses irréalisables à des gens désespérés ». Le groupe de travail doit rendre ses conclusions au gouvernement en mars.

Selon la ministre, les défis actuels concernent la propriété intellectuelle des produits de la médecine traditionnelle et l´introduction de modules adaptés dans les programmes scolaires et universitaires.
L’OMS  va organiser un congrès sur la médecine traditionnelle en novembre 2008 à Pékin (Chine). Objectif : réexaminer le rôle de la médecine traditionnelle dans la prestation des soins de santé conformément à l’approche des soins de santé primaires.

>> Les savoirs conventionnels rejoignent parfois les savoirs traditionnels. Ainsi les tradipraticiens gabonais ont insisté sur le rôle de « l’alimentation saine dans les soins de santé primaire », soulignant « l’impact d’une alimentation de qualité dans le renforcement du système immunitaire et la résistance aux infections ». « Il faut consommer beaucoup de fruits, beaucoup de légumes et moins de viande », a conseillé Le Dr Pierre Allogo.

Un message que les études scientifiques occidentales confirment aujourd’hui à 100 %….

(Sources : Gabonews, panapresse.com, lequotidien.sn, sudonline.sn, Sapa, Xinhua)

>> Voir également notre dossier Médecines traditionnelles : le réveil des sorciers (Ouvertures n° 1).

Pour aller plus loin :

>> Envoyer un droit de réponse

Les commentaires sont fermés.