Guyane : le forage en mer « excite » les pétroliers, mais pas tous les Guyanais

Il n’y a pas que le gaz de schiste qui inquiète en France. L’autorisation par le préfet d’un forage pétrolier au large des côtes guyanaises provoque lui aussi une (pour l’instant vaine) levée de boucliers.


Affiche réalisé par Guyane Nature Environnement
pour une réunion d´information.

« Le forage attendu sur le permis de Guyane Maritime, sur le « plus excitant » des prospects identifiés lors de la campagne de sismique 3D, qui est dénommé Zaedyus, peut désormais commencer. Le préfet de la région a signé le 3 mars dernier l’arrêté autorisant ce démarrage. » Ainsi que le rapporte le Bulletin de l’industrie pétrolière n° 11796 du 7 mars 2011, « le forage en Guyane française : c’est parti ! »

Il sera mis en œuvre par la compagnie britannique Tullow Oil (27,5 %), avec Shell France (45 %), Total (25 %) et un autre britannique, Northern Petroleum.

« Beaucoup d’espoirs résident dans la zone où la géologie serait similaire à celle qui a permis à Tullow de découvrir le gisement de Jubilee, au Ghana, faisant de ce pays un Etat pétrolier. Le pétrolier britannique estime qu’entre 40 millions et 1 milliard de barils pourraient sortir de sous la mer guyanaise. Le forage est réalisé par la plate-forme ENSCO 8503 par 1 000 mètres de profondeur d’eau, à 150 km au large de Cayenne. L’opération doit durer deux à trois mois ».

Les associations environnementales protestent en vain

Les pressions environnementales et le souvenir de l’accident de la plate-forme Deepwater Horizon en Louisiane avaient un moment menacé ce projet. Guyane Nature Environnement avait protesté : « Information tardive et toujours pas de concertation, des moyens de lutte contre la pollution insuffisants ou inadaptés et une précipitation de l’entreprise Tullow Oil et de l’Etat ».

Avec Greenpeace, Surfrider et le WWF, GNE a dénoncé « l´absence totale d´information des populations sur les enjeux écologiques et l´absence flagrante de retombées économiques profitables au département ».

« Depuis le début, nous n´avons pas senti d´écoute de leur part [TullowOil], se plaint de son côté le Comité régional des pêches maritimes et élevages marins de Guyane. Alors que nous sommes aussi des chefs d´entreprise, que nous avons tous besoin des produits de la mer. Nous aurions pu travailler en bonne intelligence. Notre filière est la troisième force économique de la Guyane, elle représente un millier d´emplois. Pendant la phase de concertation, nous aurions pu nous faire soutenir par des politiques… Mais non. On s´est senti bien seul ».

Dans une lettre au préfet datée du 10 février, les associations environnementales lui reprochent également de « passer outre les recommandations du 12 octobre 2010 de la Commission européenne, qui préconise : “Si la décision de suspendre des opérations de forage offshore est laissée à la discrétion des États membres, la Commission n´en réitère pas moins sa demande aux États membres de mettre en œuvre avec rigueur une démarche fondée sur la précaution lors de l´octroi de nouvelles autorisations pour des opérations d´exploration gazière et pétrolière complexes et d´examiner l´opportunité de suspendre de telles autorisations jusqu´à ce que les dispositifs européens régissant la sécurité de l´offshore aient été examinés à la lumière de l´accident de Deep water Horizon”. »

« Un simple forage de reconnaissance »

Le préfet de Guyane a tenté de désamorcer les inquiétudes, indiquant notamment qu’il s’agit d’un « forage de simple reconnaissance qui n’a pas vocation à être transformé en puits de production. Il sera d’ailleurs rebouché avant l’été prochain. » Il assure que « toutes les compétences du ministère chargé de l’écologie ont été mobilisées pour analyser le projet ».

Des voix se sont élevées cependant pour déplorer, de la part de la compagnie britannique, « une étude d’impact un peu bâclée et l’ardent désir de forer vite, avant le 1er juin 2011, date à laquelle son permis exclusif de recherche sur une vaste zone de 32 000 km² tombera. A partir de cette date, la Commission européenne risque d’encadrer avec plus de sévérité les activités d’exploration pétrolière ».

>> A lire également : “Forage en Guyane : bientôt des tortues luth mazoutées ?” sur terra-economica.

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