Ouvertures fait la synthèse des réactions des associations environnementales à la suite de la conférence environnementale qui s’est tenue les 14 et 15 septembre dernier, à l’initiative du gouvernement.
> Rassemblement pour la planète (RPP) : « Des avancées mais une vraie régression sur santé-environnement et des incertitudes sur les questions agricoles »
Biodiversité/Agriculture. « le Rassemblement note du flou sur la politique agricole. Si J-M Ayrault confirme des politiques déjà mises en œuvre, comme un moratoire sur la mise en culture des OGM, ou confirme au niveau français la volonté européenne de plafonner le taux d’incorporation des agrocarburants, ses déclarations comportent de nombreuses zones d’ombres. Sa déclaration sur l’interdiction d’épandages aériens des pesticides sauf dérogation ne constitue pas un progrès par rapport à la directive européenne en vigueur. Si nous accueillons favorablement l’idée d’un plan en faveur de l’agriculture biologique aucun objectif chiffré n’a été annoncé. Si l’effort de réduction de l’usage des pesticides a été cité l’objectif de -50% du Grenelle environnement n’est pas repris, ce que nous regrettons fortement. »
Fiscalité. « Alors que les échanges ont été consensuels sur un certain nombre de points, notamment sur la mise en place de zones franches écologiques ou la fin de certaines niches fiscales (exemple TIPP Diesel), [cela revient] simplement à faire remonter la France dans la moyenne européenne pour la fiscalité verte (elle est actuellement avant-dernière) et augmenter le niveau du malus automobile. »
Gouvernance. « Nous regrettons qu’il n’ait pas été annoncé une loi institutionnalisant le dialogue environnemental avec une vraie reconnaissance des partenaires environnementaux. » La question des class actions n’a pas été abordée « alors qu’une loi est en cours de discussion au ministère de la justice. Nous espérons que le gouvernement apportera tout son soutien à ce projet ».
Santé Environnement. Le RPP fait la même analyse que le RES (voir ci-dessous).
> WWF : « Un nouveau souffle dans la politique environnementale de la France »
Globalement, le WWF salue le cap donné qui « remet l’environnement au cœur de l’action publique. Maintenant, tout reste à réaliser concrètement ».
Énergie Climat. « L’annonce de la sortie du tout nucléaire et du tout pétrole ainsi que l’approche par la consommation et non plus la production sont enfin des objectifs reconnus par l’État. La priorité à l’efficacité énergétique, qui sera accompagnée par une éducation et une sensibilisation des publics à la maîtrise de la consommation, est une très bonne nouvelle. De même, le soutien annoncé aux filières des renouvelables est une avancée après une longue période d’instabilité règlementaire préjudiciable.
Biodiversité. « L’éducation à la biodiversité est de nouveau absente des objectifs de l’État. Le rappel de la volonté de mettre un frein à l’artificialisation nette des espaces agricoles et naturels est une annonce tout à fait positive, de même que la demande de pause sur le développement des agrocarburants de première génération. Sur la question de l’utilisation des produits phytosanitaires, si la volonté de réduction a été réaffirmée, en revanche l’absence de chiffres et de références aux engagements du Grenelle est à regretter. »
Santé et Environnement. « Les annonces vont dans le bon sens en particulier en ce qui concerne la reconnaissance du coût de l’impact des maladies liées à l’environnement et la relance de la recherche en toxicologie. »
Fiscalité. « Le WWF salue la création d’un groupe permanent de concertation sur la fiscalité écologique mais regrette que la suppression des aides publiques dommageables à l’environnement ne fassent pas partie des principes qui guideront l’action du gouvernement.
Gouvernance. « La transformation du Conseil national du développement durable et du Grenelle de l’environnement en Conseil de la transition écologique est une mesure symbolique forte qui permet de rappeler que la question environnementale est essentielle et ne saurait se diluer dans les questions de développement durable. En ce qui concerne, la responsabilité sociétale et environnementale des entreprises, et en particulier sur le reporting extra-financier, la volonté de revenir sur le décret faisant la distinction entre les obligations pour les entreprises cotées et non cotées est une bonne nouvelle. »
> Reseau Environnement Sante (RES) : « Le bilan de la table ronde Santé Environnement s’avère franchement décevant »
« Le sondage IFOP publié la veille de la conférence montrait pourtant que Santé Environnement était le domaine où les Français attendaient des décisions », remarque RES qui rappelle que le président François Hollande avait, dans son discours d’introduction, parlé d’un nécessaire « changement de cap », face au constat de la « crise sanitaire » et des « interrogations sur la croissance des maladies chroniques ».
Selon RES, les ministres en charge de la table ronde Santé Environnement, Marisol Touraine (Santé) et Geneviève Fioraso (Recherche) se sont mises d’emblée en porte à faux par rapport aux déclarations présidentielles « en refusant de faire le constat partagé à partir de la crise sanitaire liée aux maladies chroniques ».
« Le débat, introduit par la présidente de l’Institut National du Cancer (INCa) Agnès Buzyn, a porté sur un pourcentage minimaliste de l’évaluation du nombre de cancers liés à l’environnement.
« Des décisions du Grenelle qui n’avaient pas été mises en œuvre, comme la loi de protection de l’alerte et de l’expertise ou la création de l’Institut de veille environnementale ont été combattues par la ministre de la santé.
« Au final aucune action précise en matière de recherche n’a été annoncée.
« Certes, le premier ministre a annoncé que le gouvernement soutiendrait la loi Bapt […] qui interdit le bisphénol A dans les contenants alimentaires, mais le principe d’une loi sur les perturbateurs endocriniens n’a pas été retenu. Rien en ce qui concerne les particules.
« La politique de santé reste calée sur l’ancien modèle ».
J-M Governati proteste en cessant de s’alimenter
Jean-Marc Governatori, président du parti Alliance écologiste indépendante, a commencé mardi 18 septembre 2012 une grève de la faim « illimitée » pour dénoncer les conclusions de la conférence environnementale. « C’est se moquer des écologistes, il faut taper du poing sur la table », explique-t-il dans le JDD. Hollande fait du Sarkozy bis. Nous sommes dans une situation d’urgence et cette conférence a accouché d’une souris ».
Candidat à l’élection présidentielle de 2012, l’écologiste n’avait pas obtenu les 500 signatures d’élus nécessaires pour se présenter. Jean-Marc Governatori avait déjà effectué une grève de la faim pour dénoncer la différence de traitement médiatique entre les prétendants à l’Élysée et le système « corrompu des parrainages ». « C’est un cri d’alarme », juge-t-il cette fois pour défendre son initiative. « Il faut appeler les citoyens à leur responsabilité et les élus à l’action ». C’est l’écho trouvé lors de sa précédente grève qui l’a motivé à réitérer cette action, « dans un moment encore plus grave ».
> Greenpeace : « Une étape a été franchie mais on est loin du changement de société annoncé »
« Nous ne sommes pas rassurés, nous resterons vigilants sur la mise en adéquation des moyens et financements avec les objectifs sur le logement, sur les renouvelables, l’efficacité, les transports, etc. La vraie transition sera engagée quand on parlera de sortie du nucléaire et de la fin de notre dépendance aux fossiles. Nous sommes habitués aux discours pleins d’emphase sur l’environnement.
« Concernant la centrale nucléaire de Fessenheim, bien que l’annonce de la fermeture fin 2016 ait été annoncée, M. le président ne fait que préciser la date de l’application d’une de ses promesses de campagne.
« Concernant la question des hydrocarbures de schiste, le rejet des 7 demandes de permis d’exploration d’hydrocarbure de schiste a été annoncé. S’il est clair que le président de la République affirme son opposition à la fracturation hydraulique, il s’est borné à appliquer de manière rigoureuse la loi votée en 2011 par l’UMP et le PS, qui rejette la fracturation hydraulique ».
« La concertation et quelques annonces faussement nouvelles – schistes, Fessenheim – voire ambitieuses, comme le logement, ne font pas une politique environnementale en soi. On est quand même très loin du changement de société annoncé. Il faut redescendre sur terre. Les désaccords sont très nombreux. Il n’y aura pas de consensus. Le gouvernement devra trancher. »
> France nature environnement (FNE) : « La coupe est à moitié pleine »
« Un cap a été tracé par le chef de l’État, mais on attendait plus sur les moyens de la part du premier ministre. On a des soucis sur les moyens pour atteindre les objectifs de la transition écologique ».
FNE a toutefois estimé que « la volonté d’inscrire le dialogue environnemental dans le long terme est très intéressante, notamment avec une participation des citoyens ».
> Fondation pour la Nature et l’Homme Nicolas Hulot : « Cette conférence environnementale est un acte fondateur pour la gauche »
« Nous avons été entendus. Pratiquement sur tous [les sujets] ! On retrouve nos mots, nos idées, nos problématiques. Surtout, on est au niveau des enjeux de ce qui va structurer l’économie de demain. Sur la fiscalité, (…) on avance sur l’idée d’un “signal prix”, rien n’est fermé, tout est sur la table et c’est de bon augure pour la suite. Peu importe le nom, qu’on l’appelle “Contribution climat énergie” ou non, l’essentiel reste la perspective d’une fiscalité qui pèse sur l’émission des gaz à effet de serre, plutôt qu’une fiscalité qui pèse sur le travail. L’idée d’un chèque énergie, que nous défendons notamment pour les automobilistes précaires ou captifs, est également regardée de près. »
Sur l’objectif “zéro artificialisation” des terres : « C’était un tabou absolu et ce n’est d’ailleurs pas facile à faire. Mais c’était aussi une nécessité absolue. Je suis vraiment très heureux que le premier ministre passe à l’acte ».
> Le Comité 21 « se félicite des avancées mais reste vigilant »
Le Comité français pour le développement durable (Comité 21) se félicite des conclusions de la conférence environnementale : « La France semble se doter enfin d’un cap pour le développement durable mobilisant l’ensemble des ministères et donne raison aux propositions du Comité 21 sur la nécessite d’une approche transversale des problématiques.
« Le Comité 21 se réjouit également de l’ambition affichée par l’État, en matière de recherche, de mutation économique, de fiscalité et de gouvernance, à travers la mise en place d’un guichet unique sur la rénovation thermique des logements chargé de conseiller les ménages qui souhaitent mettre leur habitation aux nouvelles normes énergétiques, la hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), l’orientation des fonds de la Banque publique d’investissement sur la transition écologique, le lancement d’une politique de recherche ambitieuse sur les véhicules propres, la création de nouveaux parcs éoliens off-shore et l’élaboration d’un nouveau plan en faveur de l’agriculture biologique.
Le Comité 21 estime qu’une « nouvelle étape vient d’être engagée. Il faut maintenant concrétiser et se donner un échéancier. La conférence devra également s’enrichir de nouveaux acteurs, ceux du développement durable, de la recherche, de l’innovation et des médias. La collaboration multi-acteurs démontre chaque jour son efficacité à tous les niveaux de territoires. »