Yes you can ! Une collection de livres en anglais « sous-titrés »

Le début de A mind to murder de P. D. James

Le début de A mind to murder de P. D. James

Envie d’améliorer votre anglais, mais pas d’emporter un dictionnaire sur la plage ? Harrap’s a pensé à vous en sortant pour l’été une collection de livres anglais avec une aide à la lecture bien conçue. Les mots ou expressions difficiles sont traduits dans la marge, dans le même esprit que la vénérable revue Vocable.

Publiée au format semi-poche au prix de 8,90 euros, la collection Yes you can ! compte déjà à son actif The Drop de Michael Connelly, Paper Money de Ken Follett, A Mind to murder de P.D. James et Misery de Stephen King. Sont annoncés pour l’automne trois nouveaux auteurs, Julian Barnes, Paul Auster et Harlan Coben.

> On pourra regretter ce choix exclusif de fictions, la langue anglaise recelant de très bons essais, dont certains n’ont pas été traduits.

Taxation du gazole : l’éclairage d’hyperdebat

L’objectif d’une taxe est bien sûr de faire rentrer de l’argent. Si elle permet de donner un signal prix, pourquoi s’en priver ? Mais alors, difficile d’en prévoir toutes les conséquences. Dans le cas du gazole, le signal a été tellement puissant qu’il a fait complètement basculer le parc automobile français au diesel [1].

Les scénarios du Comité pour la fiscalité écologique (CFE), que ce soit celui de son président ou le scénario alternatif, répondent tous deux à l’objectif du gouvernement de faire rentrer de l’argent, tout en corrigeant un signal prix de plus en plus contesté. Dans les deux scénarios, les taxes (TICPE) sur le gazole et sur l’essence augmenteraient, mais l’essence moins vite que le gazole de manière à assurer un certain rattrapage. La distorsion ne serait pas supprimée, seulement réduite.
Un alignement de l’essence sur le gazole, comme le souhaite l’Automobile-club serait bien plus facile à faire passer, mais se traduirait par une perte de recettes pour le budget de l’Etat ! Inacceptable en ces temps de disette budgétaire.

Réduire l’écart de prix entre gazole et essence permet-il d’atteindre les buts allégués ?

Fragilité de l’argument santé

L’efficacité de l’alignement de la taxation du gazole sur l’essence ne va pas de soi.

Pollution à Paris (28 mars 2012)
L’efficacité de l’alignement de la taxation du gazole sur l’essence ne va pas de soi.
Crédit photo : Alberto Hernández

L’argument santé est largement utilisé pour justifier l’alignement du gazole sur l’essence. Le raisonnement parait évident : l’OMS ayant classé les particules diesel en « cancérogènes certains pour l’Homme », il faut arrêter de favoriser le gazole et donc augmenter la TICPE qui lui est attachée. Même si la cancérogénicité des particules diesel est contestée [2], nous n’avons pas ouvert ce débat. Pourquoi ? Parce que la suite de l’argumentation apparait encore plus fragile : réduire l’avantage prix du gazole par rapport à l’essence va-t-il vraiment faire baisser les émissions de particules diesel, et donc l’exposition des habitants des villes, les plus exposés ?

Examinons en détail comment le signal prix envisagé pourrait agir sur les comportements des automobilistes. On peut s’attendre à plusieurs effets :

  • Accélération du remplacement des vieux diesels. Aidés ou non par une prime de retrait, ceux qui roulent avec des diesel polluants vont être incités à changer de voiture. Si prime il y a, ces véhicules seront retirés de la circulation, et bénéfice pour la santé il pourra y avoir. Dans le cas contraire, les véhicules vont venir gonfler une offre de diesels d’occasion dont les prix vont baisser et finalement compenser le renchérissement du carburant. Les prix de l’occasion, baissant, les vendeurs seront moins enclins à se débarrasser de leur voiture. Difficile toutefois de faire des prévisions, car tout dépendra de l’équation économique et des paramètres retenus au final par le gouvernement.
2CV Citroen diesel Ce sont les petits modèles diesels polluants qui sont visés. Crédit photo :  Cédric JANODET

2CV Citroen diesel
Ce sont les petits modèles diesels polluants qui sont visés.
Crédit photo : Cédric JANODET

  • Baisse des ventes de véhicules diesel neufs. L’effet devrait être immédiat, par effet d’anticipation. Mais l’impact sur la santé sera nul, car la norme antipollution Euro6 [3], dont l’entrée en vigueur est prévue le 1er janvier 2015, prévoit d’aligner les limites d’émission des voitures essence et diesel.
  • Baisse des km parcourus. C’est plus intéressant pour la santé, car cela concerne le parc existant et donc les voitures non équipées de FAP. L’effet risque toutefois de ne pas être à la hauteur des espérances, car on sait que l’élasticité de la demande vis-à-vis d’une augmentation de prix n’est pas très grande. Selon l’OCDE [4], + 10% sur le prix de l’énergie aboutit à une baisse d’environ 2% de la consommation à court terme, et d’environ 5% sur 10 ans. Les scénarios actuellement envisagés (juin 2013) prévoyant une augmentation du prix du gazole de l’ordre de 7% pour l’un, de 14% pour l’autre d’ici 2020, il ne faut pas s’attendre ce que la consommation baisse de plus de 5 à10 %.

Le CO2 passé par pertes et profits ?

L’argument santé a quelque peu éclipsé le souci de prévenir le réchauffement climatique, qui avait au contraire conduit les gouvernements successifs à favoriser les petits diesels, qui émettent moins de CO2, par un bonus à l’achat. La Cour des comptes a ainsi minimisé l’avantage du diesel, en s’appuyant sur des chiffres de l’Ademe : « Les émissions de CO2 produites par un véhicule diesel sont du même ordre que celles produites par un véhicule à essence ». Ce que conteste PSA qui affirme que les diesels émettent 15% de moins de CO2 que l’essence [5]. Nous donnons raison à PSA, qui compare des véhicules de même performance, alors que l’Ademe raisonne sur la moyenne des véhicules vendus, essence d’un côté, diesel de l’autre, ce qui avantage les véhicules à essence, en moyenne plus petits, donc plus économes en carburant.

Va-t-on sacrifier la lutte contre le CO2 au profit de bénéfices incertains sur la santé ? On aurait pu le craindre, mais le CFE répond clairement non en introduisant dans son scénario une taxe carbone en même temps qu’il réduit l’écart de prix entre essence et gazole. Résultat : le gazole et l’essence devraient tous les deux augmenter, mais l’essence moins vite que le gazole. L’écart de prix entre gazole et essence subsisterait, mais s’alignerait sur la moyenne européenne qui est moins favorable au gazole.

La problématique est résumée par le CFE, qui marche toutefois sur des œufs :
« La réduction de l’écart de taxation essence-diesel accélère le basculement par ailleurs déjà programmé du diesel vers l’essence, notamment en ce qui concerne les petits modèles majoritairement dédiés aux déplacements urbains. L’effet environnemental est d’autant plus favorable qu’il conduit à une sortie accélérée du parc des véhicules anciens fonctionnant au gazole. (…) Une partie de ce basculement pourrait transitoirement jouer négativement sur les émissions de CO2, mais cet effet n’a pas pu faire l’objet d’une quantification complète. »

Le CFE table sur un retrait des petits modèles diesel, mais juge nécessaire une prime à la casse [6] pour les premières années (2014 et 2015) où le signal-prix sera insuffisant à faire bouger les lignes.

Aulnay contre Petroplus

L’industrie pétrolière française, contrairement à Renault et PSA, se dit favorable à un alignement des taxes sur les carburants. Son outil de raffinage est en effet inadapté à la demande française, très forte sur le gazole, faible sur l’essence.

Les ventes de carburant n’augmentent plus depuis 10 ans, mais le gazole remplace de plus en plus l’essence.

Les ventes de carburant n’augmentent plus depuis 10 ans, mais le gazole remplace de plus en plus l’essence.

Malgré la baisse des ventes de fioul domestique [7] qui vient en partie compenser la hausse de la demande de gazole, le mix de la demande ne correspond plus à ce qu’on peut extraire d’un baril de pétrole par distillation ou par les procédés traditionnels de raffinage. Pour adapter l’outil de raffinage, il faut procéder à de lourds investissements que peuvent se permettre de grands groupes comme Total, mais que d’autres opérateurs comme Petroplus n’ont pas les moyens de faire. Des investissements ont été réalisés, mais sont encore insuffisants pour satisfaire la demande, conduisant à des importations massives de gazole et à des exportations d’essence, avec un solde négatif pour la balance commerciale de la France. Dans ce contexte, la fermeture de Petroplus à Grand-Couronne s’explique autant par des raisons structurelles, surcapacité et inadaptation du raffinage, que par des raisons financières.

De son côté, l’industrie automobile française, qui a beaucoup misé sur le diesel et se trouve également en surcapacité, fait tout pour sauver son marché et ses usines. Aulnay va fermer, mais d’autres usines sont menacées si le diesel perd du terrain.

La mort du diesel ?

Il est difficile de prédire ce qui va se passer, mais en tout en état de cause, cela ne se fera pas en un jour. Le gouvernement ne veut pas brusquer les choses pour ne pas mettre en péril les constructeurs automobiles nationaux. Il souhaite leur laisser le temps de réagir et d’accélérer le développement de véhicules à basse consommation, hybrides ou non, dont l’intérêt économique sera moins dépendant du prix du carburant.

Peugeot 3008 hybride diesel La baisse de la consommation réduit la dépendance des décisions d’achat au prix du carburant. Crédit photo :  harry_nl

Peugeot 3008 hybride diesel
La baisse de la consommation réduit la dépendance des décisions d’achat au prix du carburant. Crédit photo : harry_nl

A moins d’un alignement total des taxes, comme en Angleterre, le diesel devrait rester intéressant, au moins pour les gros rouleurs :

  • Consommation inférieure (-25% selon PSA)
  • Possibilité de récupérer la TVA (pas sur l’essence !)
  • Calcul de la puissance fiscale plus avantageux

Pour débattre : Faut-il aligner la taxation du gazole sur l’essence ?

> Hyperdebat est un site de l’APIC, éditeur d’Ouvertures

[1] Les raisons invoquées historiquement pour avantager les moteurs diesel : lire la fin de l’article Cour des comptes : aligner progressivement les taxes sur le gazole et l’essence

[2] Rapport diesel PSA p. 18

[3] Rapport diesel PSA p. 29-30

[4] L. Lorentsen, OCDE – 04/05/09

[5] Argumentaire Faut-il aligner la taxation du gazole sur l’essence ?

[6] Selon le scénario de Christian de Perthuis, la prime à la casse sera réservée aux ménages éligibles au crédit d’impôt. Le scénario FNH est plus ambitieux en l’élargissant à 80% des ménages.

[7] Le fioul domestique est un produit identique au gazole à quelques additifs près.

L’hydrogène naturel, une énergie miracle ?


Les émanations naturelles d’hydrogène forment des structures circulaires visibles sur les images satellites.
La région de Lipetsk, à 450 km au Sud de Moscou (Google maps).

On pensait jusqu’alors que la terre ne recelait pas d’hydrogène. Tout l’hydrogène qui est utilisé aujourd’hui, essentiellement par l’industrie chimique, est fabriqué à partir du gaz naturel (méthane – CH4), au prix d’émissions importantes de CO2. L’hydrogène fait aussi l’objet de nombreuses recherches et spéculations en tant que vecteur d’énergie, dans le cadre de ce que Jeremy Rifkin a appelé l’économie hydrogène. L’hydrogène, obtenu par électrolyse de l’eau, servirait à stocker l’électricité produite de manière intermittente (éolien et solaire par exemple). Ensuite, il pourrait être utilisé soit comme carburant, soit converti en électricité dans des piles à combustible pour, par exemple, faire fonctionner des voitures électriques.

La faisabilité technique de l’économie hydrogène est démontrée, elle a même à son actif un certain nombre de réalisations, mais elle est loin d’avoir atteint son seuil de rentabilité.

Le décollage de l’hydrogène ?

L’annonce de l’IFPEN pourrait changer la donne. Car si l’on savait capter ou extraire l’hydrogène naturel secrété par la terre, on disposerait là d’une énergie sans émissions de CO2. Et qui plus est renouvelable, car il semblerait que l’hydrogène naturel soit issu d’un phénomène continu lié à la dynamique de la terre. Par ailleurs, l’intérêt de l’économie hydrogène en serait renforcé.

L’origine de l’hydrogène naturel fait polémique

L’origine de l’hydrogène naturel détecté sur les continents reste largement inexpliquée. L’IFPEN privilégie deux pistes :

– l’oxydation par l’eau des roches riches en fer (sous forme réduite)
– un dégazage continu de la planète, ce qui bouleverserait la conception usuelle de la composition chimique de l’intérieur des planètes terrestres.

Cette dernière hypothèse redonnerait vigueur à la théorie de la terre hydrurée de Vladimir Larin. Ce géologue russe, dont les observations d’émanations d’hydrogène remontent à 1968 et avec lequel collabore l’IFPEN, a fait l’hypothèse que la terre serait composée d’une partie interne où dominent les hydrures, entourée d’une carapace externe où dominent les oxydes. Sa théorie fait l’objet d’une guerre d’édition sur wikipedia. La page terre hydrurée a été supprimée sur le wikipedia anglophone, mais subsiste sur le wikipedia russophone. Sur la version francophone, elle a été supprimée puis réécrite et fait à nouveau l’objet d’une demande de suppression.

Même si l’IFPEN est prudent, déclarant que « le chemin est encore long avant d’envisager une production industrielle de grande ampleur », cette annonce risque de renforcer l’attentisme face aux défis du réchauffement climatique. De différer la mise en œuvre de solutions prouvées dans l’espoir hypothétique d’une solution meilleure. Et ce n’est là qu’un des risques recensés par hyperdebat : énergie miracle, un bien ou un mal ?

Les promesses de l’hydrogène naturel

L’hydrogène naturel est-il un bon candidat au titre d’énergie miracle ? Est-il abondant, sans risques, non polluant et bon marché ?

Abondant ?

Les premiers travaux d’IFPEN ont confirmé l’existence de flux localement importants d’H2 sur les plus grands massifs de péridotites, à l’échelle mondiale ; mais surtout ils ont démontré l’ubiquité de flux d’hydrogène en zone intraplaque (à l’intérieur d’une plaque tectonique). Diffus sur la plupart des sites, ces flux présentent localement des accumulations substantielles. Le nouveau programme va évaluer les parties les plus anciennes des continents, les cratons, qui couvrent des surfaces très importantes sur la planète et dont le potentiel de production est intéressant. Mais on ne dispose d’aucune évaluation chiffrée des ressources.

 Les grandes régions géologiques. Les cratons apparaissent en orange


Les grandes régions géologiques. Les cratons apparaissent en orange (Wikimedia commons).

Sans risques ?

L’hydrogène ne présente aucune toxicité, mais :

  • Son extraction pourra-t-elle se faire comme annoncé, sans toutes les conséquences dommageables de l’extraction du gaz de schiste ?
  • C’est un gaz hautement inflammable et explosif. L’industrie sait le manipuler, comme elle sait manipuler le gaz naturel depuis plus d’un siècle. Mais on oublie un peu trop que ce dernier est encore à l’origine d’accidents graves et récurrents.

Non polluant ?

La combustion de l’hydrogène est certes non polluante, puisqu’elle ne produit que de l’eau, et c’est là son point fort. Mais il faut prendre en compte toutes les pollutions, de l’extraction à l’utilisation, dont il est difficile à ce stade de faire un bilan.

Bon marché ?

« Diffus dans la plupart des sites, ces flux présentent localement des accumulations substantielles. Les différents fluides naturels étudiés peuvent présenter plus de 80 % d’H2. Ce gaz est associé à du méthane, parfois à de l’azote, et localement à de l’hélium en quantités économiquement exploitables (alors que l’approvisionnement mondial en ce gaz rare qui trouve des applications de haute technologie est par ailleurs très tendu actuellement) », selon l’IFPEN.
Il est prématuré d’estimer un coût. Il dépendra de nombreux facteurs que le programme de recherches de l’IFPEN se propose d’évaluer.

>> Pour aller plus loin : L’hydrogène naturel. La prochaine révolution énergétique ? Une énergie inépuisable et non polluante, ça existe ! Alain Prinzhofer et Eric Deville, Belin (2015), 160 p

Le pape François veut que l’Église paie ses prêtres

Le pape François en Mars 2013 (Crédit photo : Ctaholic Church (England and Wales))

Le pape François en mars 2013 – Crédit photo : Catholic Church (England and Wales)

En annonçant hier que l’Église renonçait à tout financement direct de la part des États et allait dénoncer tous les concordats en vigueur, le pape François a pris tout le monde de court. A commencer par les prêtres catholiques argentins, salariés par l’État comme ceux de beaucoup de pays à majorité catholique.

« Il est temps de marquer notre indépendance vis-à-vis du pouvoir temporel. Aujourd’hui, nous voulons rendre à César ce que nous avons trop longtemps accepté par facilité et demandons aux catholiques de subvenir aux besoins de leurs prêtres. Nous n’avons pas peur de l’avenir, la pauvreté sera notre richesse », a déclaré le pape.

En France, ce geste spectaculaire du nouveau pape n’aura qu’un impact limité, car seule l’Alsace-Moselle et quelques DOM-TOM sont concernés. Mais il satisfait de manière inattendue l’une des revendications phares des associations laïques. Celles-ci attendaient en effet que ce soient les pouvoirs publics qui mettent fin à des exceptions devenues anachroniques dans une France laïque. La balle est maintenant dans le camp des protestants et des juifs. Vont-ils suivre la voie tracée par le pape ou attendre que le gouvernement légifère ?

>> Le site hyperdebat.net, qui avait entrepris de « débattre avec méthode » de l’avenir du Concordat d’Alsace-Moselle, perd là un sujet qui semblait pourtant promis à un bel avenir.

>> Article publié le 1er avril 2013. Eh oui, ce n’était qu’une infaux !

Le Concordat en Alsace-Moselle, une épine dans le pied de la République

Religions – État : des relations compliquées (Crédit photo : Lucy Nieto, Flickr)

Le Concordat est indéniablement une épine dans le pied de la République. Discrète, peu visible, elle commence à faire mal. Le Concordat met en effet à mal deux grands principes républicains, le principe de laïcité et le principe d’égalité, celui-ci doublement, car il introduit des inégalités entre régions et entre religions. L’islam, il faut le rappeler, ne bénéficie pas du régime local des cultes.

Un débat régional aux implications nationales

Le débat reste pour l’instant limité aux départements et aux milieux directement concernés, mais, à l’image du débat sur le mariage gay, il pourrait venir sur le devant de l’actualité française. D’autant qu’il est la clef d’un des engagements de campagne de François Hollande : inscrire la loi de 1905 de séparation des églises et de l’État dans la constitution.

Bien que François Hollande ait assuré qu’il ne toucherait pas au Concordat, les experts en droit constitutionnel affirment qu’il est incompatible avec le projet présidentiel et qu’il devra être sacrifié.

En Alsace-Moselle, où le Concordat est bien ancré, les parties prenantes sont conscientes de sa précarité et s’en inquiètent.

Les autorités religieuses, catholiques, protestants et juifs, y sont plus qu’attachées, elles le défendent pied à pied. Non sans contradictions. Rares en effet sont les voix chez les chrétiens à vouloir « rendre à César ce qui est à César » comme l’enseignait Jésus. Et si le Concordat a tant de vertus, pourquoi les églises ne revendiquent-elles pas son extension au reste de la France ? Si les religions arrivent à vivre ailleurs sans ce financement de l’État, pourquoi ne le pourraient-elles pas en Alsace Moselle ? A cela elles répondent à l’unisson des politiques, y compris de gauche, que ce n’est pas qu’une affaire de financement. Que le Concordat permet une qualité de dialogue sans égale, non seulement entre les religions et les pouvoirs publics, mais aussi entre les différentes religions (l’islam en est pourtant exclu). Et qu’il ne va pas à l’encontre de la laïcité, mais constitue une autre forme de laïcité.

Direction Concorde ? Crédit : Olivier Bruchez

Concordat : discorde ou concorde ?
(La station de métro Concorde à Paris. Crédit photo : Olivier Bruchez, Flickr)

Une laïcité à redéfinir

L’argument n’est pas infondé. Pourquoi en effet ne financerait-on pas les religions ? La plupart des pays financent bien les sports ! Pourquoi être attentif à la santé physique des citoyens et pas à leur équilibre spirituel ? Sur quels fondements l’État s’arroge-t-il le droit de juger de ce qui est bon ou mauvais pour les citoyens ?

La Belgique considère que cela vaut la peine de soutenir les religions. Mais non sans un certain malaise, car, tout en poussant assez loin le principe de neutralité – jusqu’à financer des organisations laïques – le système a du mal à évoluer pour coller aux évolutions de la société.

La France s’y refuse par principe, mais le fait quand même (lien) (par exemple en accordant une réduction d’impôt d’un montant égal à 2/3 des dons aux organisations religieuses)

Le débat sur le Concordat pose en fait deux questions fondamentales :

  • Qu’est-ce que la République peut ou doit financer ? Quelles sont les frontières de l’intervention publique ?
  • Si on choisit de subventionner, comment le fait-on et sur quels critères ? Peut-on par exemple exclure des groupes minoritaires sous prétexte de risques de dérives sectaires ?

Sur le papier, les positions de la France et de la Belgique sont diamétralement opposées, mais sont-elles si éloignées que cela dans les faits ? Le temps n’est-il pas venu d’un peu plus de clarté et de courage, de faire enfin ce que l’on dit et de le faire vraiment ou de dire ce que l’on fait ?

On peut marcher avec une épine dans le pied, mais si on ne fait rien, il arrive un moment où on ne peut plus avancer.

> Pour débattre : Faut-il maintenir le Concordat ?

Religions : revoir le rôle de l’État

La République perd son âme en soutenant telle religion et pas telle autre. Et en soutenant telles religions dans une région et pas dans d’autres. La situation actuelle est fille de l’époque où le catholicisme dominait sans partage. Aujourd’hui, d’autres religions et des minorités spirituelles peuvent légitimement revendiquer une considération des pouvoirs publics. L’imbroglio ne peut que croître.

Mais pourquoi la puissance publique devrait-elle favoriser, directement ou indirectement, l’exercice religieux ? On peut considérer qu’elle est dans son rôle en soutenant l’épanouissement spirituel de ses citoyens, comme elle est déjà attentive à leur santé physique. Au nom de l’antique « mens sana in corpore sano », toujours valable, l’État peut légitimement se préoccuper de la santé psychique des Français, connus par ailleurs pour être des boulimiques de psychotropes et neuroleptiques de toutes sortes.

Mais religions et psychisme ou spiritualité, ce n’est pas la même chose !

L’État devrait avoir le courage de prendre de la distance vis-à-vis du passé et des lobbies religieux et de s’engager plutôt dans l’aide à la libération du mental, ce que les neurosciences, notamment, permettent d’envisager avec rationalité et ouverture d’esprit, c’est-à-dire dans le respect de la diversité des approches.

Il ne s’agirait pas, bien évidemment, d’imposer une laïcité sectaire ni de diaboliser les dogmes religieux existants. Mais plutôt d’aider à la réflexion argumentée, à l’acquisition de connaissances sûres et évolutives, dans le cadre d’une épistémologie rigoureuse et attentive au pluralisme des voies de recherche.

En fait, le rôle de l’État serait de favoriser l’art d’apprendre et de comprendre avec curiosité, nuance, souplesse et exigence qualitative. L’art de se forger une opinion en toute connaissance de cause, à l’abri (ou en toute conscience) des influences extérieures et intérieures à chacun. L’art de devenir un citoyen autonome de pensée – et responsable de son destin.

Jean-Luc Martin-Lagardette

Formalités facilitées pour créer une association

Il sera ainsi possible à l’avenir de créer, modifier ou dissoudre une association loi 1901 par internet.

D’autres mesures relatives à la vie citoyenne sont prévues :

– supprimer les demandes d’extraits d’acte d’état civil pour les principales démarches, dont les demandes de pièces d’identité, grâce à un échange de données entre administrations (allègement des démarches et réduction du risque de fraude)

– permettre à l’usager de préparer en ligne sa demande de vote par procuration (appréciable, quand on sait qu’aucune rature n’est tolérée !)

– développer les titres pluriannuels de séjour : un projet de loi sera présenté au premier semestre 2013.

D’autres mesures concernant le logement, l’emploi, l’enseignement, le handicap, la précarité, la justice, la sécurité et la santé ont également été annoncées.

Source : Acteurs publics

Limiter le réchauffement climatique à 2°C : mission impossible ?

Heat wave (Canicule). Crédit photo Gilderic Photography

La société PwC (PricewaterhouseCoopers, qui a réalisé un chiffre d’affaires mondial de 31,5  milliards $ en 2012 dans l’audit et le conseil)  a publié le 5 novembre 2012 une étude de prospective sur les défis du réchauffement climatique. Le rapport intitulé Low Carbon Economy Index s’attache essentiellement à comparer le rythme actuel de réduction de l’intensité carbone des principales économies mondiales à celui qu’il faudrait atteindre pour respecter l’objectif de +2°C entériné à Copenhague en 2009.

Intensité carbone

L’intensité carbone d’une économie est la quantité de CO2 (ou plutôt d’équivalent CO2 pour tenir compte des autres gaz à effet de serre) nécessaire pour produire une unité de PIB (Produit intérieur brut). Pour réduire l’intensité carbone, il faut par exemple faire des économies d’énergie, remplacer des énergies fossiles par des énergies renouvelables ou planter des arbres.

L’intensité carbone n’est qu’une des composantes de l’équation des émissions de GES (Gaz à effet de serre). L’autre composante est le PIB. Si dans le même temps que l’on réduit l’intensité carbone, le PIB croît d’autant, les efforts de  réduction des émissions de GES sont annihilés.

 Emissions de GES = Intensité carbone x PIB

 On pourra remarquer que les tenants du développement durable se focalisent sur l’intensité carbone, sans remettre véritablement en cause la croissance (du PIB), contrairement aux décroissants qui appellent à agir sur les deux termes de l’équation tout en contestant la pertinence du PIB comme indicateur phare.

L’analyse des émissions de GES a été affinée par un économiste japonais qui a proposé une équation qui porte son nom, l’équation de Kaya, qui fait également intervenir la croissance de la population.

Ne pas se voiler la face

« Si tous les citoyens européens faisaient autant de vélo que les danois, cela permettrait d’atteindre 26% de l’objectif européen de réduction de CO2 dans les transports ». Crédit photo European Cyclists’ Federation

Depuis 2000, l’intensité carbone baisse au rythme moyen de 0.8% par an au niveau mondial (0,7% en 2011), alors qu’il faudrait passer à un rythme 6 fois plus rapide (5,1% par an) si l’on veut cantonner le réchauffement à +2°C. Ce rythme n’ayant jamais été atteint au cours des 50 dernières années, les auteurs estiment irréaliste de penser qu’il pourra être atteint rapidement. Ils notent d’ailleurs que de nombreux experts en ont pris acte et étudient des scénarios beaucoup plus pessimistes, à +4, voire +6°C.

Leurs simulations montrent que si l’on n’accélère pas les efforts de réduction de l’intensité carbone de nos économies, le réchauffement de la planète risque d’excéder 6°C, un niveau jugé extrêmement dangereux par les climatologues.

Réduction annuelle moyenne de l’intensité carbone d’ici 2050 (%) Concentration de CO2 (ppm équivalent CO2) Augmentation de température
1,6 1200 +6°C
3,0 750 +4°C
4,5 550 +3°C
5,1 450 +2°C

De ce fait, ils appellent à « beaucoup plus d’ambition et d’urgence pour la politique climatique » et incitent gouvernements et acteurs économiques à se préparer aux conséquences du réchauffement. « Tout investissement dans des équipements ou des infrastructures destinés à durer doit prendre en compte les hypothèses les plus pessimistes, particulièrement dans les régions côtières et de faible altitude. Les secteurs dépendant de l’alimentation, de l’eau, de l’énergie ou des services procurés par les écosystèmes doivent examiner de près la résilience et la viabilité de leurs chaînes d’approvisionnement. Et les gouvernements doivent prévoir des actions plus radicales en faveur des communautés vulnérables ».

Le dilemme des gaz de schiste

Le rapport s’interroge également sur les gaz de schiste, se demandant si c’est un bien ou un mal. A leur actif, ils ont permis aux Etats-Unis de réduire leurs émissions de CO2 en abandonnant le charbon dans nombre de centrales électriques (avec quand même de sérieux doutes quant à leurs réels bénéfices en termes d’émission de GES).

A leur passif, les pollutions liées à leur extraction, mais aussi le fait que leur faible coût n’incite pas à investir dans des technologies nettement moins émettrices de CO2 comme le nucléaire et les énergies renouvelables ou dans la séquestration du CO2. La conversion au gaz de schiste peut certes donner un certain répit, mais ne sera en aucun cas suffisante pour faire face au défi climatique.

> Le fait qu’un cabinet conseil aussi puissant et renommé que PricewaterhouseCoopers tire le signal d’alarme climatique n’est pas anodin. Cela signifie que, bien que le risque climatique n’ait pas  constitué un enjeu des récentes élections présidentielles américaines, le monde économique ne remet plus en question la réalité du réchauffement ni ses conséquences probables.

On pourra toutefois remarquer qu’en évitant d’évoquer l’autre levier de réduction des GES, à savoir le PIB, sa modération voire sa réduction volontaire, le cabinet de conseil tente de protéger le mythe de la croissance sur lequel repose le système économique et politique dans son ensemble. Mais celui-ci pourra-t-il résister aux assauts d’un climat déréglé ?

On peut également s’étonner de la résignation de PwC à laisser filer la température, à l’encontre des conclusions du rapport Stern (2006) qui montrait sans ambigüité que le coût de l’inaction dépasserait largement le coût d’actions de prévention, même massives.

_______________________________________________________________________________

Corrida : le Conseil constitutionnel conforte l’argument de «tradition locale ininterrompue»

Le Conseil constitutionnel vient de déclarer les courses de taureaux conformes à la constitution. Il avait été saisi par deux associations : le Comité radicalement anticorrida (CRAC Europe) et Droits des animaux par le biais d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), procédure permettant, depuis 2010, de contester la conformité d’un texte législatif avec la Constitution.

La QPC déposée portait sur l’article 521-1 du Code pénal, selon lequel le fait « de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende ». Ces dispositions, précise le texte dans son alinéa 7, ne sont toutefois « pas applicables aux courses de taureaux lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être invoquée ».

Pour Me Eric Verrièle, avocat des deux associations, interrogé par Le Monde, cette distinction sur le droit animal en fonction du contexte est incompatible « avec le principe d’égalité devant la loi et l’objectif de clarté que doit revêtir cette loi ». La notion de “tradition locale ininterrompue” étant trop floue pour fonder une règle, cet alinéa doit, selon lui, être abrogé, faute de quoi le texte tout entier devrait être déclaré anticonstitutionnel.

Toujours selon Le Monde, tel n’est pas l’avis de Me Dominique Piwnica, avocat de l’Observatoire national des cultures taurines (ONCT) et de l’Union des villes taurines françaises, qui a plaidé que le principe d’égalité devant la loi supporte fréquemment des aménagements, notamment pour des motifs ” d’intérêt général”. Invoquant “le pluralisme culturel, social et régional”, il a en outre rappelé que “l’animal ne bénéficie pas d’un droit absolu”, et qu’il “peut être chassé ou élevé pour la consommation”.

>> Cet argument de “tradition locale ininterrompue” peut-elle s’appliquer au Concordat d’Alsace-Moselle ? Le débat ne manquera pas de resurgir si le président de la République  tient son engagement d’inscrire la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat dans la Constitution sans toucher au Concordat.
A débattre dès maintenant sur hyperdebat.net : Un avenir pour le Concordat ?

Un avenir pour le Concordat ?

La proposition de François Hollande – lors de sa campagne électorale de 2012 – d’inscrire la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat dans la Constitution a ravivé le débat sur l’avenir du Concordat en Alsace et Moselle. Cette exception au principe de laïcité, liée à l’histoire mouvementée de la région, le futur président de la république a finalement été contraint de la maintenir, sous la pression des élus locaux et des Eglises concernées. Mais le débat n’est pas clos.

Hyperdebat propose une nouvelle manière de débattre. Sur hyperdebat, chacun peut facilement rejoindre un débat en cours et apporter sa contribution avec l’assurance qu’elle sera retenue si elle apporte un élément nouveau.

Rejoindre le débat.

 

Une partie de la presse reprend sans tiquer une lourde bourde de l’AFP

« Google paye 22,5 milliards de dollars d´amende ». Environ deux fois ses bénéfices annuels ! C’est ce qu’affirmait sans frémir l’Agence France-Presse dans le titre d’une dépêche le 9 août 2012, repris tel quel par une partie de la presse nationale et l’ensemble de la presse régionale.

Rectificatif : A l’occasion d’un contact avec un journaliste de l’AFP, le 16 octobre 2012, Ouvertures a pu vérifier, ce qu’il aurait dû faire au moment de la publication de l’article, que la “bourde” n’incombait pas à l’AFP. En effet, le titre original de la dépêche était : “USA: Google solde pour 22,5 M USD des poursuites sur la confidentialité”, et le journaliste de l’AFP affirme qu’il n’a pu être modifié par la suite, le système informatique ne le permettant pas.
L’erreur, incontestable puisque reproduite par de nombreux journaux, s’est produite lors d’un changement de titre qui a dû intervenir dans la chaîne de transmission de la dépêche.

Dépêche AFP amende Google

Le lecteur pressé aurait fort bien pu prendre ce scoop pour argent comptant, car Google l’a habitué aux chiffres démesurés. Le nom même de Google ne vient-il pas du terme mathématique googol, qui désigne un nombre commençant par 1 et suivi de 100 zéros ? Le lecteur attentif qui aurait poursuivi la lecture de la dépêche AFP aurait pu être saisi d’un doute en constatant quelques lignes plus loin que l’amende était tombée à 22,5 millions de dollars, soit mille fois moins. Alors, 22,5 millions ou 22,5 milliards ?

Au lecteur pinailleur la phrase suivante donne des indices : « A l´échelle de Google, qui a publié le mois dernier un bénéfice trimestriel de 2,8 milliards de dollars, il s´agit d´une pénalité modeste, mais la FTC [Commission fédérale du Commerce américaine] a souligné qu´elle représentait en ce qui la concerne un montant record ». Millions donc, a priori, ce que confirme facilement la consultation de Google News, la version américaine de Google Actualités.

Cet exemple n’est pas isolé. Il n’est pas rare en effet qu’un journaliste se trompe en jonglant avec millions et milliards, ce qui est désolant. Mais la faute de l’AFP est impardonnable, car un simple contrôle de cohérence aurait suffi à la débusquer. Impardonnable également du fait de la responsabilité particulière de l’agence de presse en tant que pourvoyeuse d’informations. Si certains médias comme Le Monde, Le Figaro ou Le Point ont d´emblée rectifié l’erreur, certains de leurs confrères de la presse nationale – La Croix et Le Parisien – et l’ensemble de ceux de la presse quotidienne régionale n’ont pas fait le travail élémentaire de vérification et de recoupement qui leur incombait. Ils ont publié la dépêche telle quelle. L´AFP ayant ensuite rectifié son titre, la plupart d´entre eux ont dicrètement fait amende honorable.

La Croix 9 aout 2012 amende Google La Croix 10 aout 2012 amende Google

Le 9 août 2012, l´article de La Croix reproduit l´erreur de l´AFP. Celle-ci ne sera corrigée que le lendemain.

A noter que le titre de l’AFP est doublement fallacieux. En affirmant que Google paye une amende de 22,5 milliards de dollars, celui-ci suggère en effet que Google a accepté de payer, alors que l’article indique que Google devra payer  22,5 millions de dollars. Simple nuance ?