Lancé par le nantais Philippe Guihéneuf*, le mouvement Les Indignés du Paf (Paf : paysage audiovisuel français) organise en mars 2012 des tables rondes dans tous le pays et un appel citoyen aux candidats aux élections présidentielles. Objectif : face à la dégradation de la qualité de l’information, faire émerger des propositions pour réconcilier le public et les médias.
Ouvertures.- Comment est né le mouvement ?
Photo : JL ML. |
Philippe Guihéneuf.– Le fait déclencheur a été la révélation en décembre 2011, par le Petit Journal de Canal+, de faux reportages sur la délinquance urbaine dans l’émission « Appels d’urgence » sur TF1, avec des images récupérées ailleurs et insérées sans avertir le téléspectateur. Avant les grandes échéances électorales de 2012, la qualité de l’information est une préoccupation majeure. C’est important pour le citoyen, avant d’aller voter, de disposer d’informations fiables et honnêtement élaborées. C’est pourquoi nous avons voulu réagir vite.
Quand les médias, par mégarde ou par intention, donnent de fausses informations, cela peut avoir des conséquences dramatiques sur les personnes. En réaction, cela peut susciter des actes de protestations ou même de violence. Ainsi, la publication d’un article mal légendé en début du mois par Ouest-France a provoqué l’enfarinade de la devanture des locaux du siège à Nantes. D’où l’importance pour les médias de respecter la déontologie quant aux faits qu’ils rapportent.
– Revenons à l´émission de TF1. Qui est ce « nous » qui a voulu réagir ?
– J’ai immédiatement partagé mon indignation à plusieurs amis partout en France. Ils ont tout de suite été sensibles à cette supercherie. Nous avons cherché les moyens pour la dénoncer, notamment avec l’aide d’un avocat. Le premier cercle de personnes que j’ai contactées sont plutôt, comme moi, du monde du spectacle. Nous sommes très consommateurs de médias. Nous voulons être sûrs de l’honnêteté de l’information concernant notre travail. Et il faut que la qualité de l’information soit assurée sur l’information en général.
Le réseau en cours de constitution s’appuie sur toute personne sensible à la problématique de la qualité de l’information, quelle qu’elle soit et où qu’elle soit. Il est fédéré pour l´instant par deux associations : “les Contestataires propositifs” et “les Pieds dans le PAF“.
– La qualité de l’information, c’est vaste ! Quels sont vos axes de travail ?
– Nous explorons essentiellement trois voies :
- Préciser la définition de l’information journalistique, du travail journalistique et de l’entreprise média ;
- En voir les conséquences sur le fonctionnement des structures : capital, organisation, hiérarchie, convention collective, etc.
- Trouver et développer la place des citoyens usagers dans le monde des médias.
– En quoi consiste votre action ?
– La semaine du 20 mars, nous allons organiser une série de débats publics dans plusieurs villes en France. Nous recueillerons des idées, des remarques, des propositions des citoyens et des professionnels pour améliorer le processus de fabrication des nouvelles, pour trouver des garde-fous et protéger durablement le travail des journalistes.
Le résultat des tables rondes et la synthèse du 30 mars à Paris seront disponibles sur le site lesindignesdupaf. Nous sommes en train de prendre des rendez-vous avec les futurs signataires potentiels de l’appel.
Durant tout le mois d’avril, nous invitons les citoyens à surveiller les informations avec un œil critique. Notre site publiera les dérives qui seront signalées, après vérification de notre part. Nous voulons ainsi faire pression pour que les conditions du débat préélectoral soient le plus démocratique possible.
* Philippe Guihéneuf, 44 ans, responsable de structure de spectacle vivant, a fait du cinéma pendant 8 ans avant de se tourner vers la régie de théâtre, notamment avec Patrice Chéreau. En 2005, touché par les révoltes des banlieues, il monte un spectacle destiné à encourager les projets de jeunes, avec le théâtre associatif TNT de Nantes.