L´esthétique-parfumerie dénonce un risque de détournement médical de ses pratiques

La présidente de la Confédération nationale de l´esthétique parfumerie (la CNEP) remue ciel et terre contre un projet de décret encadrant l´activité des instituts de beauté. Selon Régine Ferrère, 90% des soins esthétiques reviendrait dès lors aux médecins. Inacceptable pour une organisation professionnelle qui englobe 56 000 salariés, dont 29 000 esthéticiennes.

Ouvertures. Vous dénoncez un projet de décret limitant les pratiques des instituts pour les réserver exclusivement au corps médical. De quelles pratiques s´agit-il concrètement ? 

Régine Ferrère. La CNEP a été informée le 31 mars que le premier ministre et le ministre de la santé tentaient de faire passer en force, dans le plus grand secret, un nouveau décret sur proposition du directeur général de la santé. Si ce décret était signé, 90% de nos pratiques seraient interdites ! Dans les domaines qui nous intéressent (la ride, le poil, la minceur), nous ne pourrions plus appliquer de produits ni utiliser des appareils innovants, à base de lumière pulsée ou autre technique électro-magnétique. C´est abusif car nos actes ne sont pas ceux de la chirurgie esthétique, dits invasifs, et logiquement réservés au corps médical. Avec 11 millions de clients, nous n´avons d´ailleurs jamais déclenché le moindre problème de santé publique… Au contraire, nous avons un rôle préventif ou d´alerte car nous savons reconnaître une anomalie dermatologique. Les esthéticiennes ne sont pas de ravissantes idiotes…

N´est-ce pas normal de vouloir protéger les clients contre des pratiques dont l´innocuité n´est pas prouvée?

Nous sommes tout à fait d´accord. On se bat même depuis 5 ans pour cela. Comme l´Etat ne veut pas nous encadrer, nous mettons en place une norme Afnor pour nous auto-réglementer. Nous prêchons pour que le personnel soit correctement formé au métier. Mais pas seulement. Pour toutes les technologies et appareils de pointe, nous souhaitons que les praticiennes acquièrent un certificat de qualification qui précise leur champ d´application (limites, contre-indications, règles d´usages). Les dispositifs doivent être contrôlés et avoir fait preuve de leur innocuité. Nous nous appuyons sur des études scientifiques sérieuses, publiées sur Pubmed ou Medline. On a désormais un recul de 25 ans sur nos pratiques. La pince à épiler ou la cire, c´est du passé ! Les clients n´en veulent plus. Il faut donc s´adapter. Nous voulons bien être encadrés, mais pas interdits d´exercer !

Vous avez déjà eu des problèmes avec l´ordre des kinésithérapeutes, maintenant c´est avec l´ordre des médecins ?

Les kinés ont cru bon de nous interdire d´employer le mot « massage » pour préserver leur profession. Qu´ont-ils fait de ce monopole ? Rien. Nous proposons toujours autant de « modelages » (c´est le mot « autorisé »). Cette activité est même en pleine expansion grâce au développement du secteur bien-être (spas, depuis l´an 2000). Avec les médecins, ce sera le même flop qu´avec les kinés. Vous imaginez 11 millions de clients aller chez un médecin ou un dermatologue pour une épilation semi-durable à la lumière pulsée, pour des applications de crème anti-ride ou minceur ? Et puis, qui payera l´addition ? Le rôle de la médecine, c´est de soulager et de soigner, pas de vendre des soins esthétiques. Que les services sanitaires s´occupent d´abord de la sécurité de leurs propres produits, plutôt que d´aller surcharger les cabinets médicaux avec nos activités cosmétiques ! Nous pèserons de tout notre poids économique puisque la discussion semble impossible sur le plan scientifique. Avec un tel décret, nos 30 000 entreprises ne vaudront plus rien du jour au lendemain.

Extrait du projet de décret

Art. D. 1151-1: La pratique des actes, procédés, techniques et méthodes à visée esthétique présentant des risques sérieux, autres que les interventions de chirurgie esthétique relevant de l´article L.6322-1, est réservée aux médecins, dès lors qu’elle a pour objet :

– L’amincissement par des produits, dispositifs, rayonnements électromagnétiques ou ultra-sons.

– L’épilation par des produits, dispositifs, techniques, rayonnements électromagnétiques ou ultra-sons en dehors de la pince et la cire.

– Le traitement des rides par des produits, dispositifs, techniques, rayonnements électromagnétiques ou ultra-sons.

> Pour aller plus loin : La Cnep a plaidé sa cause en mai dernier au sénat lors de la mission d´information sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique (vidéo ou transcription écrite).

Aspartame : à qui profite la bataille de la communication ?

Via une campagne publicitaire, l´Association internationale des édulcorants prend la défense de l´aspartame. Objectif : contrer le discrédit jeté par le Réseau environnement santé (RES). Le citoyen ballotté entre les campagnes médiatiques a bien du mal à démêler le vrai du faux…

Destinée à redorer le blason de l´aspartame, l´opération de communication aura coûté près de 500 000 euros à Azelis France, le leader européen de la distribution de produits chimiques de spécialité. C´est ce qu´a révélé récemment l´Observatoire indépendant de la publicité. Serait-ce donc le prix à payer pour perpétuer les recettes financières (et culinaires…) liées à cet additif au goût sucré, le E951, couramment utilisé dans les produits “light”?

Menée au printemps 2012 sous la houlette de l´Association internationale des édulcorants (ISA), la campagne « Aspartame, ce qu´il faut savoir », (voir les réponses dans l´illustration) a  touché environ 6 millions de lecteurs (le Figaro, le Nouvel Obs, Le Point, Top Santé, etc). Son but était probablement de contrer la mauvaise presse alimentée, notamment, par les révélations du Réseau Environnement Santé (RES), à l´heure où l´Efsa, l´Agence européenne de sécurité alimentaire se voit par ailleurs contrainte de réévaluer la dose journalière admissible (DJA) de l´aspartame (avant la fin 2012), sur demande expresse de la Commission européenne.

Le RES, un réseau très pugnace sur la question des édulcorants

Ce réseau associatif militant fait face à un double adversaire : les fabricants d´édulcorants d´une part, aux moyens financiers conséquents, et les autorités sanitaires franco-européennes d´autre part, dont les facilités de communication véhiculent un argumentaire somme toute assez similaire. Le RES se montre néanmoins très pugnace sur la question des édulcorants : lettre ouverte au ministre de la santé, note sur deux études récentes à l´attention de l´Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire), conférences de presse et veille scientifique, accusation de conflits d´intérêt chez les experts de l´aspartame, révélations sur l´absence d´études encadrant la dose journalière admissible, etc. (voir le dossier du RES).

Cette communication abondante semble commencer à fonctionner auprès des professionnels de santé qui déconseillent désormais majoritairement l´aspartame aux femmes enceintes, comme le souligne le Journal international de médecine. La faute sans doute à cette fameuse étude danoise, Halldorsson et al., parue en septembre 2010 dans la revue à comité de lecture The American journal of clinical nutrition. L´abus de soda favoriserait les naissances prématurées, conclut l´étude. « Des résultats insuffisants » d´après l´Anses, et aussi d´après l´EFSA (l´agence européenne).


Diana Banati quitte

l´Efsa pour le privé.

Mais ces avis font de moins en moins autorité du fait des multiples accusations de conflits d´intérêt qui assaillent ces agences. En effet, l´actuelle présidente de l´Efsa vient de démissionner pour rejoindre l´industrie chimique et agroalimentaire, elle devient directrice exécutive europe de l´ILSI, un lobby de 400 entreprises pour lequel elle excerçait déjà d´importantes fonctions, parallèlement à son activité pour l´Efsa…

Des experts en vérité allégée ?

La question des conflits d´intérêt, à défaut de retenir l´attention générale de la presse, a alerté le Canard Enchaîné du  25 avril 2012. Le professeur venu prêter main forte à l´industrie pour sa campagne publicitaire (voir illustration) a reçu la palme du “conflit de canard” à cause de ses liens étroits, et non mentionnés, avec le premier fabricant d´aspartame, Ajinomoto. « C´est sans doute ce qu´on appelle une vérité allégée », conclut le Canard.

Les grands médias ne relayent pour l´instant que succinctement la polémique, bien que l´aspartame soit très présent dans le quotidien de leurs lecteurs et auditeurs (notamment via l´exposition permanente à la publicité) : produits allégés, médicaments, sucreries à la caisse des supermarchés.



Au rayon édulcorant, la stévia commence peu à peu à remplacer l´aspartame, sous
la pression des consommateurs inquiets.

La grande distribution fait sa com´ sur le dos de l´aspartame

La grande distribution, quant à elle, se montre bien plus consciente du problème au point que certains distributeurs sont en train de renoncer volontairement à l´aspartame au nom du principe de précaution, un formidable argument de vente “responsable”.

Ainsi, les Magasins U ont annoncé le retrait de l´aspartame de leurs sodas maison, par le biais d´une campagne de pub dans les journaux, alors que la campagne des industriels de la chimie battait elle aussi son plein…

L´opinion publique cantonnée au niveau superficiel de l´information

De quoi déboussoler encore un peu plus l´opinion publique, cantonnée au niveau superficiel de l´information car contrainte à se forger une opinion à partir des campagnes médiatiques des pour et des contre.

Mais la petite phrase « en l´état actuel des connaissances scientifiques… »  qui faisait souvent office de formule magique pour les experts de la communication grand public, apparaît de moins en moins efficace face au « pouvoir de nuisance » du RES ou de certains lanceurs d´alerte comme Corinne Gouget, à temps plein sur le sujet :

 « On sait que l´aspartame est un poison quelque soit la dose puisqu´il se transforme en méthanol, un composé reconnu toxique, affirme Corinne Gouget, l´auteur du petit guide des additifs alimentaires, un best-seller. Sur le plan éthique, l´étude danoise sur près de 60 000 femmes enceintes n´aurait même pas dû être conduite. Mais continuer cette étude par un suivi des enfants est absolument nécessaire maintenant. Je pense que malheureusement personne n´assumera ce travail ».

Des recettes minceur à l´aspartame

Pendant ce temps là, les blogs minceur continuent de s´échanger des recettes à l´aspartame, sans se soucier vraiment des doses. Une personne 60 kg ne devrait pas ingérer plus de 2,4 g par jour, selon la réglementation officielle, mais la DJA est contestée et doit être révisée. A l´heure des forum minceurs et des recettes signées Dukan, il est nécessaire de rappeler que la cuisson de l´aspartame est a priori vivement déconseillée pour des raisons d´éventuelle toxicité. Mais sur ce point-là aussi, le débat fait rage.

> A lire par ailleurs :

– Corinne Gouget : «Aspartame, glutamate : la nouvelle génération est en danger»

– Les bonnes feuilles de l´enquête “Notre Poison quotidien” de Marie-Monique Robin, sur Owni


Amandine rêve d´une nouvelle école, son antidote au malaise enseignant

Amandine Guérin, professeur des écoles et mère de quatre enfants, fait partie des enseignants non syndiqués qui s´interrogent sur leur devenir au sein de l´éducation nationale. Avec Graine d´école, une association de la région lyonnaise qui s´appuie sur des valeurs éducatives différentes, elle a trouvé une issue de secours au célèbre “malaise enseignant”.


Amandine Guérin. Photo : Pryska Ducœurjoly.

Amandine Guérin est à un tournant de son métier d´enseignante, qu´elle exerce à Brignais (Rhône) :  « Je me pose vraiment la question de savoir si je dois continuer dans l´éducation nationale ». A 36 ans, la jeune femme a encore beaucoup de dynamisme à consacrer à l’enseignement autant qu’à ses quatre enfants. Mais bien que l´éducation soit chez elle une véritable « vocation », elle pourrait  décrocher du « système » dès la fin de son congé maternité : « Il m´est de plus en plus difficile de supporter la climat de morosité et de découragement dû à l’inertie du système. J´ai encore de l´énergie à revendre et je n´ai pas envie de la perdre en me battant toute seule contre le mammouth ! »

Beaucoup de théories mais peu de pratique

Dès sa sortie de l´Iufm (Institut de formation des maîtres), Amandine Guérin a commencé son métier en zone d´éducation prioritaire. Comme de nombreux collègues, elle a dû apprendre sur le tas. « Ce n´est pas un secret, les Iufm dispensaient beaucoup de théorie mais peu de pratique. En moyenne quatre stages de quinze jours par an, c´est insuffisant pour apprendre les rudiments de la gestion d’un groupe-classe, intégrer le savoir-être d´un enseignant. Surtout avec les élèves d´aujourd´hui… La situation s’est aggravée depuis la réforme de la formation et la disparition des Iufm. En résumé, soit vous avez la fibre pour l´enseignement et vous arrivez à vous en sortir, soit vous ne l´avez pas et les problèmes commencent… »

Un programme trop lourd

Alors que les syndicats appellent régulièrement à la grève contre les suppressions de postes et contre les multiples réformes ministérielles, Amandine Guérin pointe surtout la question des méthodes pédagogiques, pas toujours efficaces selon elle, ni adaptées aux rythmes de chacun dans les apprentissages.

«  Il est vrai qu´avoir trente élèves en classe n´est pas évident, mais je ne crois pas que cela soit le seul problème. Nous passons notre temps à courir après un programme trop lourd, qui laisse peu de temps pour échanger entre collègues. Il serait plus utile de se recentrer sur l´essentiel : la valorisation de l´élève, le droit à l’erreur… Concrètement, nous n´avons pas les moyens de prendre notre temps avec les élèves, de les amener à développer leur esprit critique et leur propre personnalité. Certains enseignants ont de bonnes idées pédagogiques, qu´ils essayent de mettre en œuvre. Mais le système est trop lourd et manque énormément de cohérence. C´est l´immobilisme qui l´emporte ».

« Le respect de l´autre, la coopération humaine »

A la recherche de solutions pour un mieux-être à l´école, Amandine Guérin s´est rapprochée de l´association Graine d´école, présidée par Pascale Furnion, enseignante en maternelle. « J´ai immédiatement été séduite par ses valeurs éducatives (voir tableau), trop rarement évoquées dans l´Éducation nationale, alors qu´elles me paraissent fondamentales. Promouvoir l´éducation à la nature, l´alimentation saine, le respect de l´autre, la coopération humaine, l´estime de soi, l´autonomie, le partage, le sens des responsabilités, etc., autant de notions qui peuvent s´intégrer dans un enseignement et bénéficier aux enfants, aux enseignants et même au contexte familial ».

Comment enseigne-t-on aux jeunes Finlandais, les mieux notés d´Europe ?


Un collège en Finlande. Il n´y a pas que la disposition des tables qui diffère du modèle français. Même quand les collégiens n´écoutent pas, les professeurs poursuivent  leur cours, apparemment comme si de rien n´était… Sont autorisés : chewing-gum, baladeurs, téléphones portables. Photo : PR. D.

Parmi les réflexions relayées par l´association Graine d´Ecole, un reportage dans un collège finlandais, réalisé dans le cadre d´un échange pédagogique avec l´IUFM de Lyon, montre comment les professeurs ont développé la « communication  bienveillante » avec leurs élèves. Si ces derniers ne sont pas toujours des modèles d´écoute, les enseignants ont appris à ne pas s´en offusquer, tout en restant disponibles quand un rêveur revient dans le cours. Une technique qui marcherait davantage que la punition ou le haussement de ton. Sans doute aussi aidé par un taux d´encadrement supérieur  à celui de la France (nombre d´enseignants par rapport au nombre d´élèves), les jeunes Finlandais sont régulièrement les mieux notés dans les classements européens, comme l´étude Pisa de l´OCDE, qui évaluent la réussite scolaire.

Amandine rêve d´une école plus ouverte sur le monde extérieur, où les parents seraient aussi mieux accueillis et plus investis. « L´association propose de découvrir des pédagogies alternatives comme les méthodes Freinet, Montessori ou encore Gattegno, afin d’apporter une réponse pédagogique personnalisée adaptée à chacun. On gagnerait beaucoup, par exemple, à réintroduire le jeu et la découverte sensorielle à la maternelle, au lieu des sempiternelles fiches trop présentes ». L´association, dont Amandine est secrétaire adjointe, relaye aussi l´actualité des groupes de réflexion sur l´éducation, la tenue de conférences et toute initiative constructive.

Dans quelques mois, la jeune femme aura pris sa décision. « Il est probable que je m´investisse désormais dans le bénévolat, au sein de l´association Graine d´Ecole. J´ai envie d´y développer des projets constructifs pour remettre l´enfant au cœur de nos pratiques et ouvrir des perspectives aux autres enseignants. C´est sans doute par ce moyen que je vais retrouver le sens du métier : accompagner l´enfant pour qu´il devienne l´adulte épanoui et responsable dont la société a besoin ».

Stan Rougier : «Ce monde manque d´amour et on en meurt !»

A 82 ans, le père Stan Rougier est un prêtre moderne. Avec 2 200 fans sur Facebook, des chroniques radio à France-Culture, une trentaine de livres, un site internet et des déplacements incessants sur toute la planète, il est un grand communiquant qui œuvre pour le retour du spirituel et de la valeur de l´amour dans notre société.


Stan Rougier est intervenu au 26e forum Terre du ciel à Aix-les-Bains. Photo : PR. D.

Ouvertures. Le monde semble bien mal en point si on regarde l´actualité : guerres, pauvreté, crise économique. C´est un peu l´apocalypse ?

Stan Rougier. Pour être franc, je n´aime pas utiliser ce mot, qui veut dire, en réalité, Révélation. Mais si vous voulez parler des « catastrophes » qu´on nous montre à la télé, je vous parlerai plutôt d´espoir et de progrès. Sur cette question, ma Bible (si je puis dire!) c´est le « Journal d´un optimiste » de Guy Sorman, qui vient de paraître, et qui regarde sous un œil joyeux la mondialisation. Connaissez-vous beaucoup de civilisations où l´on peut vivre jusqu´à 90 ans tout en restant intelligent ? On a tout de même éradiqué bon nombre de maladies. C´est pourquoi je ne souhaite pas favoriser le pessimisme, qui démoralise et rend dépressif. Chacun peut faire quelque chose pour améliorer ce monde et trouver un sens à sa vie sur terre. Si notre vie passe au creuset de la tendresse de Dieu tout change.

A l´heure où la France vote pour son nouveau président, le taux d´abstention annoncé dans les sondages montre un certain désenchantement dans la population.

La politique, ce n´est pas tout à fait mon domaine. Le Christ nous a montré une autre voie : la solution à nos maux économiques et sociaux réside dans l´ouverture de notre cœur.  Il ne faut pas chercher un Messie dans le monde politique, mais retrouver notre Messie intérieur. Comme disait Saint-Exupéry (dans Citadelle) : « Chacun de nous abrite un seigneur endormi qu’il importe de libérer de sa gangue  ». Le moins qu´on puisse dire, c´est que ça roupille sacrément ! Où sont les prophètes capables de parler à notre cœur et de réveiller notre fraternité ? Pas de Martin Luther King, pas de Nelson Mandela… Avec la baisse du nombre de vocations, il y a de moins en moins de monde pour nous aider à réveiller notre âme.

Bio expressNé en 1930 à Jurançon (Béarn), après avoir passé sa jeunesse au Pays Basque et en Auvergne, Stan Rougier est d´abord éducateur, puis infirmier. Il voulait être globe-trotter. Il sera prêtre à 30 ans. Il a été aumônier de lycée et de faculté. Prêtre du diocèse d´Evry-Corbeil, chroniqueur, prédicateur à France Culture et à la Télévision, il parcourt le monde en animant des rencontres, des retraites et en donnant des conférences. Il est notamment l´auteur de « L´avenir est à la tendresse » (Edition Salvator).

En savoir plus : stanrougier.com.

Pour prolonger : une interview de Stan Rougier réalisée par KTO TV (donc 100% acquise à la cause « catho »…) a été mise en ligne sur YouTube en avril 2012.

Comment recréer un nouveau vivre-ensemble ?

Ce monde manque d´amour et on en meurt. Le nombre de suicides de jeunes est impressionnant. Il faut retrouver les valeurs spirituelles, sans forcément parler d´une religion en particulier. Actuellement, évoquer l´Amour de Dieu ou les valeurs qui nourrissent notre âme est devenu tabou. En France, on confond laïcité et anticléricalisme. Particulièrement dans l´Éducation nationale, où la vision réservée à la religion est caricaturale. Rendez-vous compte, même dans les établissements catholiques, intervenir auprès des jeunes du second cycle est devenu difficile ! Il ne faut pas « choquer les parents ». Or les jeunes ont un grand besoin d´entendre qu´ils ne sont pas que des consommateurs, qu´il y a en eux une âme qui possède deux facultés essentielles : s´émerveiller et aimer. Nier la spiritualité, c´est nous faire croire que nous sommes des brebis ou des moutons, alors que nous sommes en réalité des lions. Il faut réveiller notre vraie nature, qui est beaucoup plus que ce que l´on croit, et qui ne demande qu´à courir librement vers de grandes étendues.

Le problème de la religion, c´est qu´elle n´a pas bonne presse !

Je pense que les médias ont une grande part de responsabilité dans la vision que les gens ont de la religion. A force de montrer seulement les dérives, qui sont réelles d´un côté, les gens ne savent pas que croire peut apporter un réel sens à sa vie. Méfions-nous des contrefaçons de la véritable religion. Le Christ lui-même s´est trouvé en butte avec une vision « légaliste » de la foi, où il n´y a plus que des règles et des lois, alors qu´il apportait une nouvelle vision du Père, pleine de tendresse et de compassion. Les extrémistes de tout bord manifestent seulement leur étroitesse d´esprit. Une personne qui a un marteau dans la tête voit des clous partout… Ce phénomène de déviance n´est pas propre au fait spirituel, il existe en tout domaine. La religion, c´est comme le cholestérol, il y a le bon qui fait vivre, et l´autre qui tue. Ne jetons pas le bébé avec l’eau de son bain !

Face à la Miviludes, la santé alternative joue la carte du « laisser dire »

Ayurveda, naturopathie, thérapies énergétiques et autres méthodes de santé « non conventionnelles » sont régulièrement discréditées par l´instance chargée de la lutte contre les dérives sectaires, la Miviludes (voir notre article). Qu´en pensent les praticiens visés ?


Les Ecoles de naturopathie, comme ici Euronature, sont organisées au sein d´une fédération nationale,
la Fenahman.

Edité par la Miviludes (Mission interministérielle de lutte contre les sectes, rattaché auprès du premier ministre), le nouveau guide « Santé et dérives sectaires » jette une fois de plus le discrédit sur la médecine non-conventionnelle, déjà mise en mal dans les deux précédents rapports annuels 2010 et 2009. Le présent guide cite une quarantaine d’approches alternatives, susceptibles de conduire à des « dérives sectaires ».

Naturopathie, ayurvéda, gemmothérapie, décodage biologique, kinésiologie, thérapies quantiques, la liste est longue et « non exhaustive » pour la Miviludes, qui souhaite mettre en garde les patients qui s´écartent de la médecine officielle. « Les dangers de ce marché alternatif de la guérison et du bien-être » tiennent essentiellement au fait qu’elles ne sont « ni réglementées ni validées scientifiquement », écrit la mission interministérielle.

« Certaines de ces pratiques répondent aux critères de la dérive sectaire car elles sont le fait de “gourous thérapeutiques” qui exercent une véritable emprise mentale sur les malades, pour mieux les dépouiller de leurs ressources. » Sur les bienfaits potentiels de ces méthodes alternatives ? RAS.

Déception, stupéfaction, indignation du côté des thérapeutes en santé naturelle ? Pas vraiment, plutôt une forme de stoïcisme… « Que voulez-vous qu´on y fasse. Cela fait trente ans que l´on nous tape dessus sans la moindre preuve », soupire-t-on, habitué, du côté de l´organisation des naturopathes professionnels, héritiers d´Hippocrate, le père de la médecine… Et de la prévention, rappelle les naturopathes. « Aujourd´hui, il suffit qu´on recommande de manger sainement, de modifier ses habitudes de vie pour être soupçonnés de dérives sectaires… »

La Miviludes ? Un épiphénomène


Aux Etats-Unis, les médecines alternatives
sont mieux intégrées par le corps médical.
L´auteur de cet ouvrage, Brent Bauer,
est directeur du Programme de médecine
douce et alternative et médecin au
Département de médecine interne de
la clinique Mayo à Rochester (Minnesota).

« On ne va pas polémiquer avec la Miviludes et alimenter l´agressivité par l´agressivité », oppose pacifiquement Éveline Mathelet, la présidente de Ayurveda France, association qui regroupe les professionnels de cette tradition orientale. « La Miviludes est un épiphénomène à l´échelle de notre héritage qui allie santé et philosophie depuis 5 000 ans. Il y avait des praticiens en Ayurvéda avant la Miviludes, il y en aura toujours après. »

Face aux accusations de potentielle dérives sectaires, Ayurveda France ne se sent donc pas concerné. « On n´est pas dans la révélation soudaine d´un gourou, mais dans un héritage millénaire traditionnel, d´ailleurs pleinement reconnu et encouragé par l´Organisation mondiale de la santé (OMS).

L´Ayurveda cultive l´éducation de la personne à mieux se connaître, l´autonomie et la responsabilité en matière de santé. Tout l´inverse d´une secte… Chacun pourra constater que la majorité de nos praticiens ont abandonné des carrières lucratives ou sécurisantes pour se consacrer à leur nouveau métier. Chez nous, personne ne roule sur l´or au détriment de sa clientèle. »

La majorité des thérapeutes en santé alternative vivent modestement de leur activité. Se constituer un revenu régulier prend généralement du temps à partir de l´installation. N´étant pas remboursés par la sécurité sociale, ils ne peuvent en outre afficher des tarifs trop élevés. On est loin du train de vie de certains grands pontes en médecine, dont les dépassements d´honoraires (voir l´enquête du journal Le Monde) grèvent le budget santé de malades parfois désespérés, sans autre recours « officiel » pour être soignés…

Outils d´avant-garde

« A aucun moment nos pratiques ne se substituent à la médecine conventionnelle, commente de son côté Laurent Michel, praticien en thérapie quantique, utilisant le système LIFE. Tout patient peut continuer son traitement, qu´il soit allopathique ou homéopathique. Nous visons au contraire la complémentarité et nos outils d´avant-garde n´entraînent aucun effet secondaire néfaste. Une personne qui vient me voir reste entièrement libre de prendre un second rendez-vous.  L´accusation de potentielle dérive sectaire intervient sur fond de guerre entre la médecine conventionnelle et les soins alternatifs qui représentent surtout une nuisance pour le chiffre d´affaire des laboratoires, alors que les patients, eux, y trouvent un réel bénéfice ».

> Utilisées par un nombre croissant de personnes (4 Français sur 10 y ont recours), les pratiques de santé non conventionnelles sont évoquées sous l´angle exclusif de leur potentielle dangerosité par la Miviludes. S´il apparaît nécessaire de « nettoyer le fond du panier » (selon l´expression d´un praticien alternatif contacté par Ouvertures!), il est regrettable que l´utilité des thérapies alternatives ne soit pas même reconnue, notamment pour leur aspect prévention santé. Alors que l´OMS encourage le développement de plusieurs médecines alternatives en complément de la médecine officielle (naturopathie, ayurveda, ostéopathie, tuina, medecine chinoise, médecine Unani, entre autres), la Miviludes crée une confusion avec d´autres pratiques moins éprouvées ou moins anciennes (Reiki, Ennéagramme, méthode Hamer, etc), jetant de fait le soupçon sur toute la santé alternative.

L´engouement des Français pour ces pratiques, anciennes ou récentes, témoigne d´une certaine efficacité des thérapeutes alternatifs, mettant par ailleurs en relief les insuffisances de la médecine actuelle (effets secondaires des médicaments, incapacité à guérir certains maux, manque d´écoute du patient, scandales sanitaires liés à la collusion). C´est donc légitimement que les Français usent de leur liberté thérapeutique (inscrite dans la loi) pour explorer avec empirisme de nouvelles pistes, sans pour autant abdiquer leur esprit critique, se fiant surtout aux résultats.

>Lire également Le gouvernement publie sans débat contradictoire une liste noire de médecines douces.

2027 : la fin du « pétrolithique » ?

Parmi les différents ateliers proposés au colloque « Incarner l´Utopie », qui se clôturait ce lundi 9 avril à Aix-les-Bains, cent personnes ont participé à une expérience de rêve éveillé. Nous sommes en 2027, décrivez l´agriculture, l´éducation, la santé, le monde dans 15 ans…


“Incarner l´utopie”, oui mais laquelle? Tel était le thème de “l´atelier 2027”. Photo Pryska Ducoeurjoly

« Un autre monde est possible », disent les altermondialistes. Ce n´est pas le millier de participants du Forum « Incarner l´utopie » qui diront le contraire. Oui, mais quel monde ? C´est justement à cette question que l´atelier « Rêver l´utopie » proposait de répondre, samedi, au cours d´une expérience collective de rêve éveillé, à laquelle ont participé cent personnes, un panel représentatif de la communauté des « créatifs culturels ».

« Je vous propose de vous répartir à votre guise dans les six domaines suivants : gouvernance, économie, santé, terre&nature, éducation, art de vivre », explique l´animateur, Ivan Maltcheff. Les chaises se déplacent pour créer des cercles de tailles pour le moins différentes. Alors que les thèmes santé ou environnement forment de grands cercles, l´économie ne fait rêver que cinq pour cent des participants…

La méthode ? Donner libre court à son cerveau droit, celui qui est relié à l´intuition, à la vision, aux émotions, se projeter en 2027 comme s´il s´agissait du moment présent ; et surtout courtcircuiter le cerveau gauche, qui analyse, explique, rationalise.

« C´est une méthode qui est utilisée en entreprise pour développer la vision des dirigeants sur l´avenir de leur société par exemple. Les créatifs du marketing pratiquent aussi cette technique », explique à Ouvertures Ivan Maltcheff qui a proposé ce travail pendant plusieurs années dans le secteur privé.

Sa rencontre avec la société civile alternative l´a amené à enrichir cet outil pour en faire bénéficier le grand public : « Les citoyens doivent se réapproprier leur capacité créatrice, actuellement aux mains d´experts. Le peuple n´est consulté que sur des sujets limités et marginaux. Pour les grands enjeux, il n´est pas autorisé à rêver d´un monde différent. Soit parce que le changement est impossible, nous dit-on, soit parce qu´il doit être pensé et élaboré par ceux “qui savent” ».

Retour en 2012. Après le rêve qui a amené les participants dans une contrée inconnue, l´après-pétrolithique (néologisme employé par Pierre Rabhi au cours du forum), le retour à la réalité est difficile. Certains restent sur leur faim : « Mai 68, le Larzac, on connaît… je ne vois pas ce que ça peut apporter de rêver. » D´autres conservent tout de même beaucoup d´espoir : « On incarne tous déjà cette utopie finalement ! C´est une expérience enrichissante de pouvoir se relier ».

« Cet exercice est constructif et utile si la vision produite est analysée par l´autre partie du cerveau, analytique et rationnelle, nuance l´animateur. Le temps imparti et le nombre de participant ne permet pas de mener ici cet aller-retour nécessaire entre cerveau droit et cerveau gauche : l´un propose une vision, l´autre doit l´examiner au crible de la réalité. Il faut répondre aux questions suivantes : “Ce rêve est-il possible ? Si oui, comment les événements se sont-ils produits exactement ? En quelle année précisément ? Quelles ont été les étapes ?”

« Ce processus, qui implique l´ensemble de nos facultés cérébrales, fait émerger des idées utiles et des moyens pour y arriver. Ce travail s´avère particulièrement intéressant en comité plus restreint, lorsqu´on note toutes les informations captées, ou lorsqu´on intègre quelques artistes dans le groupe », explique Ivan Maltcheff.

Face à la panne de l´innovation dans les projets politiques de la campagne 2012 et face à l´abstention civique récurrente, « il est évident que nous aurons besoin de ce type d´outils pour travailler sur notre futur et oser une nouvelle vision ».

Quelques extraits des rêveries des participants en 2027

Economie. « Il n´y a pas de chômage, car nous avons tous un travail, si on peut encore appeler cela du travail ! D´ailleurs, pourquoi partir en vacances. Chacun a sa place et est à sa place. Les activités de proximité sont foisonnantes, centrées sur les besoins humains. Il y a par exemple du monde derrière les guichets. Le modèle dominant est celui de la petite entreprise, ces dernières foisonnent et évoluent en réseaux, nombreux et principalement locaux (les firmes internationales se sont récemment cassées la figure). Les déchets sont valorisés en permanence, rien ne se perd. Troc, échange d´activités, entraide, prospérité sans croissance et une sécurité matérielle pour tous. Le modèle agricole connaît un renouveau. L´énergie est gratuite et accessible à tous, car on peut la capter partout ».

Santé. « La maladie physique est en voie de disparition. On se soigne par la nature. On se concentre sur les problèmes psychiques avec les outils proposés par la sagesse. Chacun est responsable de sa santé et des moyens pour la conserver. Mais lorsque l´un tombe malade, la communauté proche en est préoccupée et prend en charge. Dans les villages, il y a beaucoup d´échanges. Les hôpitaux sont plus nombreux, plus petits, de forme ronde. La question de la mort est bien vécue, car elle est appréhendée comme un passage, une transformation, où le groupe intervient en accompagnement, ce qui atténue l´inquiétude ou l´angoisse.

Terre et nature.  On fait la sieste dans les arbres en ville. Les jardins spontanés fleurissent partout, pas toujours très organisés. L´abondance de la nature nourrit la population, les animaux sont  nombreux,  l´eau (des océans ou des rivières) est propre. Nous n´avons pas peur de faire des enfants dans ce monde en paix et centré sur le respect du vivant, où les peuples se parlent et les générations se côtoient »

Education. « L´enfant est au centre de la pédagogie, on lui donne les moyens de trouver sa voie, de s´insérer dans le monde, de se relier à l´autre. L´éducation passe par la connaissance de la terre. La confiance en la capacité de l´enfant à grandir est totale. On reconnaît aussi les jeunes comme une source d´enseignement pour les grands ».

Art de vivre. « L´habitat est original, il ressemble beaucoup à ses habitants, très créatifs. Les portes sont ouvertes. La notion de propriété est bien relative désormais : on partage les potagers, on accueille chez soi des sans-abri… Entre voisins, on se connaît bien, on cultive ensemble la joie de vivre et la culture de l´apaisement. On se parle, on se touche, on est pleinement vivants, nourris, épanouis ».

Gouvernance. « Les partis politiques n´existent plus comme en 2012, on ne va pas se battre pour des idéologies ! Désormais, les décisions sont prises en faisant appel à l´intelligence collective et à la bonne volonté des administrés. Internet a développé des outils pour la participation citoyenne, en quelques clics on peut donner son avis. Désormais, le peuple a la capacité d´exercer pleinement son pouvoir de décision.

 

Pierre Rabhi : «Nous sommes devenus consentants à l´absurdité du monde»

Le colloque « Incarner l´Utopie », organisé par l´association Terre du ciel, s´est ouvert hier, samedi 7 avril 2012, au centre des congrès d´Aix-les-Bains pour trois jours. 1 100 personnes ont participé à la séance d´ouverture sous le parrainage de Pierre Rabhi.

Forum terredu ciel aix 2012
Ouverture du 26e forum Terre du ciel, Aix-les-Bains, samedi 7 avril 2012.  Photo Fabian Da Costa

Le centre des congrès d´Aix-les-Bains est en ébullition… pacifique. Pendant trois jours,  plus de 1 000 personnes intéressées par le développement individuel et social participent au 26e forum organisé par Terre du ciel, centre de sagesse et de spiritualité, sous le thème « Incarner l´utopie ». De nombreuses conférences, des forums ouverts, des ateliers seront proposés autour d´une cinquantaine d´intervenants impliqués dans des initiatives solidaires.

Tout particulièrement cette année, cette manifestation veut impulser une convergence des réseaux alternatifs (ils sont environ 120 réunis à Aix) dans le but d´atteindre la « masse critique », c´est-à-dire le poids humain à partir duquel la société peut basculer vers un changement radical : en l´occurrence, pour les participants du forum, un changement vers une société plus juste, écologique, solidaire, humaine.

Masse critique atteinte

« Ce colloque a été particulièrement conçu pour amorcer cette coopération des réseaux », a expliqué Alain Chevillat, le président de Terre du ciel en ouverture, hier après-midi devant un parterre bondé.  « Nous sommes de plus en plus nombreux à refuser la logique du monde moderne, à ne plus vouloir le cautionner, à ressentir le besoin d´autre chose. Cette masse critique est aujourd´hui atteinte, ce qui nous redonne du courage, de la conviction, de la foi, mais aussi, vis-à-vis de l´extérieur, de la crédibilité ! »

Colibris
      Stand du réseau Colibris au village des Utopies. Photo Pr. D.

« Il y a de plus en plus d´innovations en France, d´initiatives concrètes très positives, confirme Alain Aubry, chargé de l´animation du réseau des Colibris (l´association créée par Pierre Rabhi, « grand témoin » de ce 26e forum).  Mais si le changement attendu ne s´est pas encore produit, c´est parce qu´il y a un déficit de synergie entre les acteurs. Nous n´arrivons pas encore à faire système et à nous organiser pour être plus efficace sur le territoire ».

Intelligence collective

En ouverture de ce colloque, les participants ont donc été invités à s´écouter entre eux, à coopérer dans l´esprit de l´« intelligence collective » : « il ne suffit pas de faire connaître ses idées, il faut aussi apprendre à faire un pas de côté par rapport à soi-même. Pour parvenir à coopérer véritablement, chacun doit passer par une évolution personnelle afin d´être capable de se relier à l´autre sur l´essentiel, en y laissant, peut-être, une petite part de soi-même ».

L´universitaire Faouzi Skali, fondateur du Festival de Fès des musiques sacrées du monde a exhorté le public à quitter la société du « tout-à-l´égo », selon les termes de Régis Debray, pour aller vers la société du non-égo. « Actuellement, c´est l´égoïsme rationnel, bien géré, qui nous est imposé comme seule possibilité car il faut coller à la nature humaine qui, soit-disant, n´est pas bonne. Cherchez donc votre intérêt personnel en tout, nous dit-on, et vous aurez le bien public »…

L´idéologie de l´homme démiurge

« Nous sommes devenus consentants à l´absurdité du monde par le biais d´une manipulation des êtres humains mise en place par le système », assure Pierre Rabhi, agriculteur et penseur d´origine algérienne, auteur de nombreux ouvrages humanistes de référence, « l´un des rares sages de la France d´aujourd´hui », dixit Alain Chevillat.

« Ce n´est pas d´aujourd´hui que l´homme est en excès, de nombreuses civilisations passées sont enfouies sous le sable. Mais cette fois-ci, nos capacités technologiques démultiplient notre pouvoir de destruction. Grisés par le fait que nous soyons arrivés à transformer la matière, nous sommes devenus les esclaves de nos outils et de nos créations. L´idéologie de l´homme tout-puissant, de l´homme démiurge nous a mené à l´impasse actuelle. Nous ne témoignons pas de cette intelligence qui transcende et éclaire la conscience. Si des extraterrestres nous observaient, ils concluraient sans doute que nous sommes des êtres surdoués mais complètement abrutis…

« Incarner l´utopie, c´est changer de vision du monde. C´est par la manière dont on la voit que l´on crée une société », explique le paysan philosophe. « Il ne s´agit pas de produire une nouvelle chimère mais de faire basculer notre point de vue sur un autre versant », explique Pierre Rahbi, appelant à la transgression. « Car les dégâts sur la vie nous invitent de manière urgente à changer pour ne pas disparaître ! Alors soyons de plus en plus utopiste car c´est la seule voie de la sagesse ».

> Terre du ciel, forum Incarner l´utopie, 7-8-9 avril, centre des congrès d´Aix-les-bains, de 7h30 à 22 h.

Jacques Henno : « Nous sommes devenus les esclaves de Google, Facebook et Apple »

Dans son dernier livre, Silicon Valley / Prédateurs vallée ?, le journaliste Jacques Henno dresse l´inquiétant constat d´une société à la merci des géants des nouvelles technologies. Selon ce spécialiste de la sécurisation des données personnelles sur Internet (voir sa bio), notre vie privée est exploitée à notre insu dans une insatiable quête de profits commerciaux.

Ouvertures.- Auteur de plusieurs ouvrages sur les nouvelles technologies, vous êtes passionné par l´impact d´Internet sur notre vie privée. Après Tous fichés, paru en 2005, on vous doit notamment un guide pratique Facebook et nos enfants et un livre d´investigation Silicon Valley, Prédateurs vallée ? Dans ce dernier livre, vous dites que nous sommes devenus les « esclaves » de Google, Facebook et Apple. N´est-ce pas un peu fort ?

Jacques Henno.– Il y a deux arguments en faveur de cette affirmation. D´abord, les gens travaillent gratuitement pour ces géants. A chaque fois que nous utilisons leurs services, nous leur donnons des informations sur nos centres d´intérêt. Cela alimente leur très lucrative activité publicitaire, toujours plus efficace et rentable car ciblée sur notre personnalité. Les bénéfices de Google en la matière se chiffrent en milliards de dollars : 9,7 milliards de dollars de bénéfice net en 2011 ; 96% du chiffre d’affaires provient de la publicité. Ensuite, nous ne sommes plus tout à fait libres du fait que nous sommes devenus dépendants de ces entreprises, par le biais des services de messagerie comme Gmail, des réseaux sociaux que nous consultons tous les jours comme Facebook (850 millions d´utilisateurs) ou Google +. Apple a aussi étendu son influence partout dans le monde, avec 200 millions de numéros de cartes bancaires dans sa banque de données.

– En quoi est-ce gênant que Google contrôle plus de 65% de la publicité en ligne aux Etats-Unis et en France ?

Cette situation de quasi-monopole lui permet de mieux contrôler nos réactions et d´adapter encore mieux ses services en ciblant notre « double numérique ». C´est en effet la publicité qui fait vivre des géants comme Facebook et Google. J´ai pu décortiquer le fonctionnement de la publicité comportementale et des « Adservers » (services publicitaires pour le net) dans une vidéo disponible sur mon site. Les cookies, ou logiciels espions, traquent notre comportement au fur et à mesure de nos navigations. C´est pourquoi nous sommes de plus en plus assaillis par des offres publicitaires ciblées lorsque nous naviguons sur le Web. Notre « double numérique » s´étoffe dans les fiches de données personnelles possédées par ces géants, elles sont constamment affinées à chaque navigation. C´est un peu comme si vous vous baladiez dans la rue en laissant des traces visibles très longtemps, avec quelqu´un qui vous suit et note tous vos faits et gestes, pour vous proposer ensuite des offres commerciales adaptées…

– « Je n´ai rien à cacher, je n´ai donc rien à craindre », disent certains internautes. Qu´en pensez-vous ?

– Avec ce discours, on légitime par exemple la vidéosurveillance dans la rue. Certes, cela peut être justifié dans certains lieux, mais on peut se demander s´il est bien sain qu´une démocratie permette la totale traçabilité de nos comportements. La navigation Internet n´est-elle pas un acte qui relève de la vie privée ? N´ai-je pas le droit de visiter des sites en toute tranquillité et en toute discrétion (dans la mesure où ces sites n´enfreignent pas la loi, bien sûr !).

– Vous insistez sur le caractère inquiétant de l´évolution de ces technologies, de plus en plus présentes dans notre vie.

Je tire la sonnette d´alarme parce que les progrès technologiques nous entraînent désormais plus loin que le domaine virtuel. Les Google, Facebook et Apple visent désormais « la vraie vie », notamment par le biais des nombreuses applications sur les téléphones mobiles. Pour ces sociétés qui se sont lancées dans une course effrénée de collectes de données privées, le portable est bien plus efficace que l´ordinateur familial pour dresser notre profil. Elles peuvent savoir où nous sommes, ce que nous faisons, et même ce que nous achetons en temps réel (voir par exemple le développement des applications pour payer sur son téléphone mobile).

– Est-ce la « dictature numérique » qui se profile ?

– D´un côté, nous percevons bien les avantages que nous offrent ces géants des nouvelles technologies comme des facilités de déplacement ou d´accès aux informations. Ces informations représentent chaque année une colonne de DVD qui va de la terre à la lune et qui revient à la terre ! Un DVD contenant 3 000 romans de 200 pages… Bref, on peut imaginer le nombre d´applications positives qui peut en découler. Google est capable de prédire plusieurs jours à l´avance une épidémie de grippe, grâce aux mots-clés entrés sur son moteur de recherche. Mais le revers de la médaille, c´est que Google peut savoir qui est atteint par telle pathologie et comment il envisage de se soigner. Nous devenons de plus en plus vulnérables parce que nous n´avons plus aucun secret pour ces entreprises privées qui en savent plus sur nous que les services secrets ! Elles repèrent ce que l´on fait, où l´on est et ce que l´on pense. La prochaine étape pour elles, c´est d´arriver à nous influencer. Nul doute qu´elles sauront vendre ce type de service aux plus intéressés, notamment les partis politiques.

Comment un parti politique peut-il tirer profit de notre double numérique ?Pour Jacques Henno, la démocratie pourrait être mise en danger par le fait que nos données personnelles soient monnayées, pour mieux contrôler nos réactions dans les urnes.

« Prenez l’exemple de RapLeaf, une entreprise de San Francisco, tout à côté de la Silicon Valley. Elle se vante de pouvoir, à partir d’une simple adresse email, “profiler” quelqu’un. Ses bases de données, très indiscrètes, comporteraient les noms, les prénoms, le sexe, l’activité, les centres d’intérêt, le statut de propriétaire ou de locataire, etc. de plus de 200 millions de personnes.

J’ai fait le test : je me suis inscrit à un essai gratuit des services de RapLeaf et j’ai entré un des mails que j’utilise ; l’entreprise m’a donné accès à la fiche qu´elle a constituée sur moi. Celle-ci indiquait mon âge approximatif, mon sexe, ma ville de résidence, mes six principaux centres d’intérêt, mon plus haut diplôme, si j’étais célibataire ou marié, si j’avais ou non des enfants, les revenus de notre foyer, si nous étions propriétaires ou locataires, si nous habitions dans une maison ou un appartement, la valeur de notre habitation, mon métier, si je possédais un smartphone, combien de voitures nous avions, si nous donnions à des œuvres de charité, à des partis politiques, si j’étais plutôt de droite ou de gauche, si je votais… Au total, RapLeaf classe les Américains parmi 400 catégories ! Toutes les données rassemblées par RapLeaf peuvent servir à nous envoyer des publicités, mais aussi des messages politiques ciblés ! Déjà les deux grands partis politiques américains, le parti démocrates et le parti républicains, font partie des clients de RapLeaf.

Or, dans un récent rapport, les responsables de Terra Nova, une fondation proche du parti socialiste français et ayant pour but de produire et diffuser des solutions politiques innovantes en France et en Europe, estiment souhaitable d’importer dans l’Hexagone les méthodes marketing  des partis politiques américains.

Imaginez : un parti politique qui met la main sur notre “double numérique” connaît nos préoccupations (le chômage, l’avenir de nos enfants, la hausse des impôts…) et sait ce que nous pensons de telle femme ou tel homme politiques. Ses spécialistes de la communication et du marketing n’ont plus alors qu’à confectionner un argumentaire “taillé sur mesure” pour répondre à nos attentes et à nos éventuelles critiques…

Seul bémol : les partis politiques pourraient aussi devenir les esclaves de ces technologies, au même titre que nous. N´oublions pas que Barack Obama s’appuie beaucoup au cours de ses campagnes sur les réseaux sociaux et que les dirigeants de la Silicon Valley font partie de ses “généreux” donateurs. Il est devenu doublement dépendant  des largesses financières de ces géants et de leurs technologies. »

> Silicon Valley / Prédateurs Vallée ? Comment Apple, Facebook, Google et les autres s’emparent de nos données. Editions Télémaque, 124 pages, novembre 2011, 13,50 euros. Voir aussi : le supplément Internet au livre et le sommaire.

Face à l´inertie française, les trottoirs producteurs d´énergie de Viha Concept s´expatrient

Laurent Villerouge, créateur d´une technologie qui récupère l´énergie via la marche des passants, jette l´éponge en France. Il a signé avec les États-Unis pour développer ses dalles et trottoirs innovants. Sa mésaventure souligne le désintérêt de la France pour la recherche sur les énergies alternatives.


Installation des plaques sur un trottoir. L´énergie récupérée servira à l´éclairage
de la rue.
Photo : Philippe Lejeaille.

Cela faisait des mois et des mois que la jeune entreprise Viha Concept tentait d´intéresser des investisseurs à son projet de domotique urbaine : récupérer l´énergie des passants ou des voitures à travers des dalles pour la transformer en éclairage local. Une idée lumineuse, qui n´a pas manqué d´enthousiasmer tout le monde : le ministère de l’écologie, des collectivités, des filiales de gros groupes français, la presse aussi…


Laurent Villerouge,
Pdg de Viha Concept.

Mais voilà : « Il ne nous a pas fallu plus de quatre heures pour convaincre les Américains et signer un accord de confidentialité, alors qu´ici on n´attend toujours une réponse sur une éventuelle possibilité », lance, dépité, Laurent Villerouge, le dirigeant de Viha Concept.

Le développement de Viha Concept s´inscrit dans l´« Energy harvesting » (moisson d´énergie), secteur de recherche permettant d´exploiter des sources d´énergie faibles, diffuses, présentes partout, et essentiellement gratuites. « Le but de ces techniques est d´économiser l´énergie, mais seulement de façon accessoire : les niveaux absolus mis en jeu ne sont de toutes façons pas énormes. Le motif principal est de se libérer de toute source d´énergie » (source Futura-sciences). Dans le cas des dalles de Viha Concept, le produit ne marche que s´il est installé sur un lieu très passant.

Comment la France a-t-elle pu laisser filer cette technologie alternative ? Les applications et perspectives d´économies sont pourtant nombreuses : « On peut installer le produit dans tous les endroits où il y a du passage : péage d´autoroute, gares, parkings, trottoirs des centres-villes, aéroports. La dalle Viha Concept fonctionne avec le poids des pas ou d´une roue (voir cette vidéo d´un prototype installé à Toulouse, ndlr). Au passage de ce poids, la dalle s´affaisse de quelques millimètres et convertit l´énergie cinétique en énergie électrique grâce à un générateur électromagnétique. Un piéton peut produire 10 Ws (watt.seconde), une roue de voiture circulant à 10 Km/h, 60 Ws, détaille Laurent Villerouge, détenteur de plusieurs brevets pour des applications variées, aussi bien pour les particuliers que pour les entreprises.

« Les retours se font attendre »


Au passage d´un poids, la dalle s´affaisse
de quelques millimètres et convertit
l´énergie cinétique en énergie électrique.
Photo : Philippe Lejeaille.

Par exemple, 50 dalles et 3 600 personnes qui marchent dessus donnent 500 Wh, soit 10 heures d´éclairage pour un réverbère à leds de 50 W. 20 dalles routières et 1000 voitures qui roulent dessus, donnent 666 Wh.

« A raison de 100 € la dalle, on peut arriver à concurrencer le prix habituel de l´installation d´une rangée de réverbères branché sur le réseau. Creuser des tranchées est finalement très coûteux, environ 200 euros le mètre linéaire, sans compter le prix de l´enrobé ou le parement piéton. A cela s’ajoute la consommation électrique et l’entretien du réseau. L´avantage du système Viha Concept est que le parement est inclus avec le générateur et qu´en cas de problème de réseau (canalisation qui casse par exemple ou remplacement de conduite) il suffit de déposer la dalle sur le côté pendant les travaux puis de la réinstaller tout simplement après l´intervention ».

L´idée de récupérer une onde de choc peut aussi s´appliquer aux portières des voitures (pour alimenter le plafonnier par exemple) ou aux lave-linge dans la phase d´essorage (pour chauffer l´eau du prochain cycle). Bref, autant de possibilités que Viha Concept a présenté à beaucoup, beaucoup de gens potentiellement intéressés pour financer le développement industriel, la dernière phase avant la commercialisation du produit.

« La viabilité du système, à son stade de développement, restait problématique »

« Cette étape est indispensable pour faire évoluer le produit en terme de rendement et de compétitivité, explique Laurent Villerouge. « Au début, l´accueil est toujours encourageant, on sent les personnes emballées, mais par la suite les retours se font attendre. Il faut sans cesse revenir à la charge, passer de services en services, justifier le caractère innovant du produit. Nous avons ainsi été reçus par des département de recherche développement de filiales de Véolia et de Bouygues, nous avons présenté le projet à la Commission européenne en avril 2011, nous avons participé à des opérations d´investissement public comme “Ville de demain”, nous avons même eu des contacts rapprochés avec le ministère de l’écologie. Là-bas, ou bien notre dossier s´était égaré ou bien la personne chargée du suivi ne travaillait plus dans le service  », raconte Laurent Villerouge.

Contactée par Ouvertures, la filiale concernée de Bouygues explique : « Faire aboutir ce type de dossier prend du temps dans une grande boutique, relate la personne qui a reçu la requête de Laurent Villerouge… Il m´a semblé que la viabilité du système, à son stade de développement, restait problématique car l´énergie fournie n´est pas forcément à la hauteur de l´énergie demandée par un éclairage public. L´énergie générée est par ailleurs essentiellement fournie le jour, ce qui nécessite des batteries dont l´impact environnemental ne s´inscrit pas dans le développement durable. Il n´est toutefois pas exclu que ce produit puisse à terme résoudre ces contraintes ».

Fin de l’aventure en France

A force d´épuiser son énergie, Laurent Villerouge décide donc d´aller faire un tour aux États-Unis, à l´université de New York et au MIT de Boston. « L´accueil a été radicalement différent. Le suivi immédiat. Finalement, c´est l´université de New York qui s´est engagée sur la finalisation de la partie recherche & développement et une entreprise américaine pour le rachat du brevet. Très vite, l’université nous a mis en contact avec une société privée susceptible d´exploiter la licence ».

Finie donc l´aventure en France ? « Je considère que l´affaire est définitivement réglée ici. Il y a tellement d´inertie, aussi bien dans les administrations que dans les grandes entreprises, que cela m´a passé l´envie de progresser dans notre pays. Nous ne sommes pas les seuls à proposer de l´innovation verte et à rencontrer ce type de mur… Je ne sais pas si c´est de l´immobilisme, de la résistance psychologique, de la frilosité ou une volonté de nous épuiser pour mieux récupérer l´idée, mais quoiqu´il en soit, ne pas avoir réussi à percer en France reste incroyable! »

Infections froides : « un microbe = une maladie », la fin d´un paradigme ?

La maladie de Lyme n´est pas la seule pathologie posant des problèmes de diagnostic au corps médical, ce qui entraine des parcours de soin interminables comme celui de Judith Albertat (voir notre article). Le groupe de chercheurs et de médecins Chronimed s´est rassemblé autour de ce problème des « infections froides ».


Dominique Rueff.

La maladie de Lyme bouscule le paradigme médical actuel. Un microbe = une maladie, cela ne marche plus pour expliquer les causes de cette pathologie qui englobe plusieurs maladies et symptômes et sans soute aussi des co-infections (la bactérie borrélia ne serait pas la seule en cause).

« Le malade est un puzzle qui est mis en pièces détachées par les spécialistes. On nous voit par petits bouts sans possibilité de relier les symptômes. Beaucoup de médecins ne veulent pas se remettre en question, tant leur formation et leur bagage universitaire les a pétris de certitudes », témoigne Judith Albertat.

« En 2012, les choses commencent à changer : on ne peut plus accéder à la pathologie globale d´une personne sans prendre en compte son environnement », explique le docteur Dominique Rueff,  président de l´Association pour le développement de la médecine ortho-moléculaire (Adno). Il vient de signer la préface du livre de Judith Albertat, “Maladie de Lyme, mon parcours pour retrouver la santé”.

« Il faut tenir compte aussi bien des spécificités actuelles de l’alimentation industrielle, dont peu de gens ont conscience, car il s’agit d’une situation absolument nouvelle dans l’histoire de l’humanité, avec des pollutions agricoles, industrielles, bactériennes, virales, électromagnétiques auxquelles tant de personnes ont du mal à s’adapter. C’est de cette pollution infectieuse qu’a souffert Judith, pollution que l’on résume sous le terme “d’infections froides” et dont la borrelia n’est qu’un des acteurs parmi d’autres connus ou inconnus ».

Maladies chroniques

L´expression infections froides est nouvelle. Elle désigne des maladies chroniques qui enrayent progressivement la machine humaine à la suite d´une ou plusieurs infections à bas bruit, infections ne générant pas de fièvre. C´est le sujet de travail du groupe Chronimed, présidé par Dominique Rueff, autour du Professeur Luc Montagnier. Parmi les infections froides, outre la maladie de Lyme ou la candidose, on trouverait aussi l´autisme… qui pourrait être guéri à condition de considérer l´aspect infectieux latent, et bien sûr l´environnement (notamment l´intoxication aux métaux lourds, qui revient souvent dans la maladie de Lyme également).

« Comme nous l´avons constaté, patients et médecins, ceux qui n’entrent pas dans le cadre étroit de cette médecine universitaire, ne sont pas tous bons pour le psy : ils peuvent simplement être infectés ou intoxiqués, assure Dominique Rueff. Qu’il s’agisse de maladies psychiatriques, de fatigues chroniques, de fibromyalgies, de maladies inflammatoires métaboliques ou articulaires, de maladies de dégénérescence comme certains Parkinson ou Alzheimer et même certains cancers, beaucoup d’entre eux furent améliorés, peu ou prou, par des traitements anti-infectieux adaptés associés à des traitements de terrain visant à remonter leurs propres défenses. C’est cette voie et cette rencontre qu’a fini par trouver Judith après ses années de souffrance, c’est ce témoignage qu’elle nous confie ».

> A lire :

– Docteur Dominique Rueff, « Mieux que Guérir, Les bénéfices de la Médecine intégrative », préface de Luc Montagnier, éditions Josette Lyon, décembre 2011.

> Retour au dossier Maladie de Lyme

> « Le microbe n´est rien, c´est le terrain qui est tout ». Cette expression chère à Claude Bernard (1813-1878) serait-elle en train de regagner du terrain face à l´hégémonie des principes de Louis Pasteur, son contemporain (1822-1895) ?

Ce dernier focalisait sur l´agression des virus et des bactéries, mais faisait peu de cas de l´état général du patient et de son contexte de vie. Vieux de 150 ans, les postulats pasteuriens (notamment un microbe=une maladie, ou un virus=un vaccin), sont encore largement reconnus, comme le laisse entrevoir l´intense politique de promotion vaccinale… Mais ces hypothèses ne semblent plus tout à fait d´actualité au regard des travaux novateurs des chercheurs de Chronimed.

Avec l´augmentation du nombre de personnes atteintes par des infections froides, la médecine est en train d´évoluer et de tendre la main aux principes ancestraux de la naturopathie qui pourraient du coup retrouver ses lettres de noblesse dans les traitements de fond. L´avant-garde médicale est en passe de redécouvrir son ancien patron : Hippocrate.